Convention européenne sur le rapatriement des mineurs, (STE No. 071).

 

Préambule

    Les Etats membres du Conseil de l'Europe, signataires de la présente Convention,
    Considérant que leur étroite union se manifeste, notamment, par un accroissement de la circulation des personnes;
    Considérant que si ce fait n'a généralement que d'heureuses conséquences, il pose néanmoins certains problèmes, notamment quand un mineur se trouve sur le territoire d'un Etat contre la volonté de ceux qui sont appelés à protéger ses intérêts ou quand sa présence sur le territoire d'un Etat est incompatible, soit avec ses propres intérêts, soit avec ceux de cet Etat;
    Convaincus de la nécessité de coopérer afin de permettre le transfèrement de ces mineurs par voie d'autorité,
    Sont convenus de ce qui suit:

Titre I – Dispositions générales

    Au sens de la présente Convention l'expression:

    1. mineur désigne toute personne qui n'a pas encore atteint la majorité d'après la loi applicable selon les règles du droit international privé de l'Etat requérant et qui, d'après cette loi, n'a pas la capacité de fixer seule sa résidence;
    2. autorité parentale désigne le droit de fixer la résidence du mineur, dont sont investies des personnes physiques ou morales par l'effet de la loi ou d'une décision judiciaire ou administrative;
    3. rapatriement d'un mineur désigne le transfèrement de celui-ci, en application de la présente Convention, d'un Etat contractant dans un autre Etat contractant, que ce dernier Etat soit ou non celui dont le mineur est ressortissant.
  1. La présente Convention s'applique aux mineurs qui se trouvent sur le territoire d'un Etat contractant et dont le rapatriement est demandé par un autre Etat contractant pour l'une des raisons suivantes:
    1. la présence du mineur sur le territoire de l'Etat requis est contraire à la volonté de la personne ou des personnes qui détiennent à son égard l'autorité parentale;
    2. la présence du mineur sur le territoire de l'Etat requis est incompatible avec une mesure de protection ou de rééducation prise à son égard par les autorités compétentes de l'Etat requérant;
    3. la présence du mineur sur le territoire de l'Etat requérant est nécessaire en raison d'une procédure visant à prendre à son égard des mesures de protection ou de rééducation.
  2. La présente Convention s'applique également au rapatriement des mineurs qui se trouvent sur le territoire d'un Etat contractant lorsque cet Etat estime leur présence contraire à ses propres intérêts ou aux intérêts de ces mineurs et pour autant que sa législation lui permette de les éloigner de son territoire.

    Chaque Etat contractant désigne une autorité centrale chargée de former, d'adresser et de recevoir les requêtes aux fins de rapatriement. Cette désignation est notifiée au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe.

Titre II – Rapatriement sur la requête d'un Etat autre que l'Etat de séjour

  1. Toute demande visant à obtenir le rapatriement d'un mineur pour une des raisons prévues à l'article 2, paragraphe 1, est adressée à l'autorité centrale de l'Etat vers lequel le rapatriement est sollicité.
  2. Si les autorités compétentes de cet Etat estiment la demande bien fondée et opportune, l'autorité centrale dudit Etat adresse à l'autorité centrale de l'Etat de séjour du mineur une requête aux fins de rapatriement.
  1. Aucune décision sur une requête aux fins de rapatriement n'est prise avant que le mineur ait été entendu personnellement, si ses facultés de discernement le permettent, par une autorité compétente de l'Etat requis.
  2. En outre, cette autorité s'efforce de recueillir l'avis des personnes intéressées par ladite décision et, notamment, de celles qui détiennent l'autorité parentale ou qui, sur le territoire de l'Etat requis assurent en fait la garde du mineur. Cette consultation n'a lieu que dans la mesure où elle n'est pas de nature à porter préjudice aux intérêts du mineur en raison des délais qu'elle peut nécessiter.

    L'Etat requis donne une suite favorable à toute requête aux fins de rapatriement conforme à la présente Convention et fondée sur l'article 2, paragraphe 1, à moins qu'il n'exerce la faculté de la rejeter en application des articles 7 et 8.

    La requête peut être rejetée:

    1. si le mineur a, d'après la loi applicable selon les règles du droit international privé de l'Etat requis, la capacité de fixer seul sa résidence ou si une telle capacité découle de la législation interne de l'Etat requis;
    2. si la requête est fondée sur l'article 2, paragraphe 1.a et vise à soumettre le mineur à l'autorité de personnes qui ne détiennent pas l'autorité parentale d'après la loi applicable selon les règles du droit international privé de l'Etat requis ou qui ne détiennent pas l'autorité parentale selon la législation interne de l'Etat requis;
    3. si l'Etat requis considère que l'Etat requérant n'est pas compétent pour prendre les mesures prévues à l'article 2, paragraphe 1.b et c;
    4. si l'Etat requis estime que le rapatriement du mineur est contraire à son ordre public;
    5. si le mineur est ressortissant de l'Etat requis;
    6. s'il s'agit d'un mineur ressortissant d'un Etat non contractant dont le rapatriement ne serait pas compatible avec les engagements existant entre cet Etat et l'Etat requis.

    L'Etat requis peut, en outre, compte tenu de toutes les circonstances de l'affaire, rejeter la requête:

    1. si la personne ou les personnes qui détiennent l'autorité parentale ou à qui le mineur est confié se trouvent sur le territoire de l'Etat requis et s'opposent au rapatriement;
    2. si le rapatriement est considéré comme étant contraire à l'intérêt du mineur, notamment lorsque ce dernier a des liens familiaux ou sociaux effectifs dans cet Etat ou lorsque le rapatriement est incompatible avec une mesure de protection ou de rééducation prise dans ledit Etat.

    L'Etat requis peut ajourner sa décision sur la requête:

    1. si l'autorité parentale, sur laquelle la requête est fondée, est contestée pour des raisons sérieuses;
    2. s'il estime nécessaire de poursuivre le mineur pour une infraction ou de lui faire subir une sanction pénale privative de liberté.

    Si la requête est accueillie, les autorités compétentes de l'Etat requérant et celles de l'Etat requis fixent, d'un commun accord et dans les meilleurs délais, les modalités de rapatriement.

    L'Etat requis peut prendre les mesures provisoires nécessaires en vue du rapatriement et, notamment, placer le mineur dans une institution de protection de la jeunesse. Il peut mettre fin à tout moment à ces mesures qui cessent, en tout cas, à l'expiration d'un délai de 30 jours si la requête n'a pas été accueillie. Ces mesures provisoires sont régies par le droit interne de l'Etat requis.

    En cas d'urgence, l'autorité centrale de l'Etat requérant peut demander que les mesures provisoires visées à l'article 11 soient prises avant même la réception, par l'Etat requis, de la requête aux fins de rapatriement. Ces mesures cessent si cette dernière requête n'a pas été reçue dans les dix jours.

  1. Lorsqu'une personne est rapatriée conformément aux dispositions du présent titre, aucune poursuite pénale ne peut être ni engagée ni continuée à son encontre dans l'Etat requérant pour des faits commis avant son rapatriement, à moins que l'Etat requis n'y consente expressément. Ce consentement est également requis pour l'exécution d'une condamnation à une sanction pénale privative de liberté ou à une peine plus grave, prononcée dans l'Etat requérant avant le rapatriement.
  2. Le consentement prévu au paragraphe 1 est régi par les règles applicables dans l'Etat requis en matière d'extradition ou par toutes autres règles instituées dans cet Etat en vue de l'application du présent article.
  3. Le consentement ne peut être refusé dans les cas où l'Etat requis serait tenu d'accorder l'extradition si celle-ci était demandée.

Titre III – Rapatriement sur la requête de l'Etat de séjour

  1. Dans les cas prévus à l'article 2, paragraphe 2, l'Etat de séjour du mineur peut demander à un autre Etat contractant d'accepter le rapatriement de ce mineur selon les dispositions suivantes:
    1. lorsque la personne ou les personnes qui détiennent l'autorité parentale se trouvent dans un autre Etat contractant, la requête est adressée à cet Etat;
    2. lorsque la personne ou les personnes qui détiennent l'autorité parentale se trouvent dans un Etat non contractant, la requête est adressée à l'Etat contractant où le mineur a sa résidence habituelle;
    3. lorsque l'Etat où se trouvent la personne ou les personnes qui détiennent l'autorité parentale n'est pas connu ou lorsque personne ne détient cette autorité, la requête est adressée à l'Etat contractant où le mineur a sa résidence habituelle ou, si le rapatriement vers cet Etat est refusé ou ne peut avoir lieu, à l'Etat contractant dont le mineur est ressortissant.
  2. Les dispositions du paragraphe 1 n'affectent pas les pouvoirs que les Etats contractants tiennent de leur propre législation relative aux étrangers.
  1. Si l'Etat requis accepte de recevoir le mineur, les autorités compétentes de l'Etat requérant et de l'Etat requis fixent, d'un commun accord et dans les meilleurs délais, les modalités du rapatriement.
  2. La requête aux fins de rapatriement peut être accompagnée d'une demande tendant à ce que soit prise toute mesure appropriée en raison de la conduite ou de la situation du mineur dans l'Etat requérant. Elle peut mentionner en outre toutes conditions auxquelles le rapatriement serait subordonné.

Titre IV – Dispositions communes

  1. Toute requête aux fins de rapatriement est formulée par écrit et indique notamment:
    1. l'autorité centrale dont elle émane;
    2. l'identité et la nationalité du mineur dont le rapatriement est demandé ainsi que, le cas échéant, son lieu de résidence dans l'Etat requis;
    3. les raisons invoquées à l'appui de la requête;
    4. le cas échéant, l'autorité ou la personne qui a présenté la demande de rapatriement et la nature de ses rapports juridiques avec le mineur.
  2. Dans le cas visé à l'article 2, paragraphe 1, la requête est accompagnée, s'il y a lieu, de l'original ou d'une copie authentique, soit du titre justificatif de l'autorité parentale à moins que cette autorité ne découle directement de la loi, soit de la décision ordonnant une mesure de protection ou de rééducation à l'égard du mineur, soit des documents faisant apparaître la nécessité de la comparution du mineur dans la procédure en cours dans l'Etat requérant ainsi que les buts de cette procédure.
  3. Si l'Etat requis estime que les renseignements fournis par l'Etat requérant sont insuffisants pour lui permettre de statuer sur la requête, il demande les informations complémentaires qui lui sont nécessaires. Il peut fixer un délai pour l'obtention de ces informations.
  1. Sous réserve des dispositions du paragraphe 2 du présent article, la traduction des requêtes et des pièces annexes n'est pas exigée.
  2. Tout Etat contractant peut, au moment de la signature ou du dépôt de son instrument de ratification, d'acceptation ou d'adhésion, par déclaration adressée au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe, se réserver la faculté d'exiger que les requêtes et pièces annexes lui soient adressées, accompagnées, soit d'une traduction dans sa propre langue ou dans l'une de ses langues, soit d'une traduction dans l'une quelconque des langues officielles du Conseil de l'Europe ou dans celle de ces langues qu'il indiquera. Les autres Etats contractants peuvent appliquer la règle de la réciprocité.
  3. Le présent article ne porte pas atteinte aux dispositions relatives à la traduction des requêtes et pièces annexes contenues dans les accords ou arrangements en vigueur ou à intervenir entre deux ou plusieurs Etats contractants.

    Les pièces et documents transmis en application de la présente Convention sont dispensés de toutes formalités de légalisation.

  1. Le transit d'un mineur en voie de rapatriement, conformément à la présente Convention, à travers le territoire d'un Etat contractant, est accordé sur simple notification laissant une trace écrite et émanant de l'Etat à partir duquel le rapatriement doit être effectué.
  2. Le transit peut être refusé dans le cas où:
    1. le mineur fait l'objet d'une poursuite pénale dans l'Etat de transit ou s'il doit y subir une sanction pénale privative de liberté ou une peine plus grave;
    2. le mineur est ressortissant de l'Etat de transit.
  3. Lorsque le transit n'est pas refusé, le mineur ne peut être ni arrêté ni détenu dans l'Etat de transit en raison de faits commis avant son entrée dans cet Etat.
  4. L'Etat de transit veille à ce que le mineur ne se soustraie pas au rapatriement.

    Tout refus de rapatriement ou de transit est motivé.

    Les communications entre autorités centrales relatives à l'application de la présente Convention peuvent être transmises par l'intermédiaire de l'Organisation internationale de police criminelle (Interpol).

  1. Les frais engagés en vue de l'application de la présente Convention sont à la charge:
    1. de l'Etat requis, s'ils sont engagés sur son propre territoire;
    2. de l'Etat requérant, dans les autres cas.
  2. Le présent article ne fait pas obstacle au recouvrement des frais sur le mineur ou sur les autres personnes qui en seraient redevables.

Titre V – Dispositions finales

  1. La présente Convention est ouverte à la signature des Etats membres représentés au Comité des Ministres du Conseil de l'Europe. Elle sera ratifiée ou acceptée. Les instruments de ratification ou d'acceptation seront déposés près le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe.
  2. La Convention entrera en vigueur trois mois après la date du dépôt du troisième instrument de ratification ou d'acceptation.
  3. Elle entrera en vigueur à l'égard de tout Etat signataire, qui la ratifiera ou l'acceptera ultérieurement trois mois après la date du dépôt de son instrument de ratification ou d'acceptation.
  1. Après l'entrée en vigueur de la présente Convention, le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe pourra inviter tout Etat non membre du Conseil de l'Europe à adhérer à la présente Convention.
  2. L'adhésion s'effectuera par le dépôt, près le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe, d'un instrument d'adhésion qui prendra effet trois mois après la date de son dépôt.

    Chaque Etat contractant pourra, par une déclaration faite au moment de la signature ou du dépôt de son instrument de ratification, d'acceptation ou d'adhésion définir, en ce qui le concerne, le terme ressortissant au sens de la présente Convention.

  1. Tout Etat contractant peut, au moment de la signature ou au moment du dépôt de son instrument de ratification, d'acceptation ou d'adhésion, désigner le ou les territoires auxquels s'appliquera la présente Convention.
  2. Tout Etat contractant peut, au moment du dépôt de son instrument de ratification, d'acceptation ou d'adhésion, ou à tout autre moment par la suite, étendre l'application de la présente Convention, par déclaration adressée au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe, à tout autre territoire désigné dans la déclaration et dont il assure les relations internationales ou pour lequel il est habilité à stipuler.
  3. Toute déclaration faite en vertu du paragraphe précédent pourra être retirée, en ce qui concerne tout territoire désigné dans cette déclaration, aux conditions prévues par l'article 29 de la présente Convention.
  1. Sous réserve des dispositions des paragraphes 3 et 4 du présent article, la présente Convention abroge, en ce qui concerne les territoires auxquels elle s'applique, les dispositions des traités, conventions ou accords bilatéraux, qui, entre Etats contractants, régissent le rapatriement des mineurs pour les raisons prévues à l'article 2, dans la mesure où les Etats contractants ont toujours la faculté de recourir aux possibilités de rapatriement prévues par la présente Convention.
  2. La présente Convention ne s'oppose pas au rapatriement ou à l'extradition fondés soit sur des conventions ou accords internationaux, soit sur le droit interne de l'Etat en cause.
  3. Les Etats contractants peuvent conclure entre eux des accords bilatéraux ou multilatéraux relatifs aux questions réglées par la présente Convention; toutefois, de tels accords ne pourront être conclus qu'en vue de compléter les dispositions de celle-ci ou pour faciliter l'application des principes qui y sont contenus. Ils peuvent, notamment, prévoir, par des accords ou des arrangements bilatéraux ou multilatéraux des rapports directs entre autorités locales.
  4. En outre, si deux ou plusieurs Etats contractants ont établi ou viennent à établir leurs relations sur la base d'une législation uniforme ou d'un régime particulier, ils auront la faculté de régler leurs rapports en la matière en se fondant exclusivement sur ces systèmes, nonobstant les dispositions de la présente Convention. Les Etats contractants qui viendraient à exclure dans leurs rapports mutuels l'application de la présente Convention conformément aux dispositions du présent paragraphe adresseront à cet effet une notification au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe.

    Le Conseil de l'Europe suivra l'exécution de la présente Convention et facilitera autant que de besoin le règlement amiable de toute difficulté à laquelle l'exécution de la Convention donnerait lieu.

  1. La présente Convention demeurera en vigueur sans limitation de durée.
  2. Tout Etat contractant pourra, en ce qui le concerne, dénoncer la présente Convention en adressant une notification au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe.
  3. La dénonciation prendra effet six mois après la date de la réception de la notification par le Secrétaire Général.

    Le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe notifiera aux Etats membres représentés au Comité des Ministres du Conseil et à tout Etat ayant adhéré à la présente Convention:

    1. toute signature;
    2. le dépôt de tout instrument de ratification, d'acceptation ou d'adhésion;
    3. toute notification effectuée en vertu de l'article 3 de la présente Convention;
    4. toute date d'entrée en vigueur de la présente Convention conformément à son article 23;
    5. toute déclaration effectuée en vertu de l'article 25;
    6. toute notification effectuée en vertu de l'article 26;
    7. toute notification effectuée en vertu de l'article 27, paragraphe 4;
    8. toute notification reçue en application des dispositions de l'article 29 et la date à laquelle la dénonciation prendra effet.

    En foi de quoi, les soussignés, dûment autorisés à cet effet, ont signé la présente Convention.
    Fait à La Haye, le 28 mai 1970, en français et anglais, les deux textes faisant également foi, en un seul exemplaire qui sera déposé dans les archives du Conseil de l'Europe. Le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe en communiquera copie certifiée conforme à chacun des Etats signataires et adhérents.

 


Home / Treaties / Search / Links