COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUES,
SOCIAUX ET CULTURELS
Vingt-huitième session
29 avril-17 mai 2002
EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES
CONFORMÉMENT AUX ARTICLES 16 ET 17 DU PACTE
Observations finales du Comité des droits économiques,
sociaux et culturels
RÉPUBLIQUE TCHÈQUE
1. Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a examiné le rapport
initial de la République tchèque sur l'application du Pacte international
relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (E/1990/5/Add.47) à ses
3e, 4e et 5e séances, tenues le 30 avril et le 1er mai 2002 (E/C.12/2001/SR.3
à 5), et a adopté à sa 23e séance, tenue le 15 mai 2002, les observations
finales ci-après.
A. Introduction
2. Le Comité accueille avec satisfaction le rapport initial de l'État partie,
qu'il a jugé exhaustif et, d'une manière générale, conforme à ses directives
sur l'établissement des rapports.
3. Le Comité note avec satisfaction le caractère approfondi des réponses données
par écrit et oralement par l'État partie, ainsi que la sincérité et la franchise
du dialogue constructif engagé avec la délégation. Le Comité se félicite aussi
que la délégation se soit déclarée disposée à fournir de plus amples renseignements
par écrit concernant les questions auxquelles elle n'a pu répondre au cours
du dialogue.
B. Aspects positifs
4. Le Comité note avec satisfaction qu'un certain nombre de lois ont été promulguées
et que des réformes législatives ont été entreprises dans le pays en vue de
promouvoir les droits économiques, sociaux et culturels.
5. Le Comité se félicite de la création du Conseil des droits de l'homme près
le Gouvernement (1998) et du Bureau du Protecteur public des droits (1999).
6. Le Comité note avec satisfaction la participation d'organisations non gouvernementales
à l'établissement du rapport.
C. Facteurs et difficultés entravant l'application du
Pacte
7. Le Comité note que le processus de transition vers l'économie de marché
a compliqué la réalisation, par l'État partie, des droits économiques, sociaux
et culturels consacrés par le Pacte.
D. Principaux sujets de préoccupation
8. Le Comité regrette qu'il n'ait pas été donné plein effet au Pacte dans
l'ordre juridique de l'État partie et que la plupart des droits consacrés
par le Pacte ne soient pas justiciables de l'ordre juridique interne, en particulier
le droit à un logement décent, considéré par l'État partie comme un «droit
de pure forme, non consacré par la loi».
9. Le Comité regrette l'absence de plan national d'action pour la protection
des droits de l'homme ainsi que le prévoit la Déclaration de Vienne de 1993.
Le Comité est en outre préoccupé par l'absence d'une institution nationale
indépendante de défense des droits de l'homme conforme aux Principes de Paris
de 1991.
10. Le Comité constate avec préoccupation que l'inefficacité des filets de
protection sociale, au cours du processus de restructuration et de privatisation,
a eu des effets préjudiciables sur l'exercice des droits économiques, sociaux
et culturels, en particulier par les groupes les plus défavorisés et marginalisés.
11. Le Comité est préoccupé par la décision récente de l'État partie de continuer
d'appliquer, en violation de ses obligations au titre des articles 2.2 et
6 du Pacte, les lois «de lustration».
12. Le Comité est profondément préoccupé par la forte discrimination dont
sont victimes les Roms dans les domaines de l'emploi, du logement et de l'éducation.
Bien que l'État partie reconnaisse ce fait, les mesures administratives et
législatives qu'il a prises pour améliorer la situation socioéconomique des
Roms ne suffisent toujours pas à régler le problème. Le Comité est également
préoccupé de ce que, en dépit des programmes en faveur des Roms mis en œuvre
par l'État partie, aucune législation spécifique n'a été adoptée pour proscrire
la discrimination à leur égard.
13. Le Comité note avec préoccupation que plusieurs conventions de l'Organisation
internationale du Travail (OIT) relatives aux droits économiques, sociaux
et culturels n'ont pas été ratifiées par l'État partie.
14. Le Comité s'inquiète de la montée du chômage, en particulier parmi les
femmes, les Roms et les autres groupes vulnérables.
15. Le Comité est préoccupé de ce que le salaire minimum n'est toujours pas
suffisant pour assurer un niveau de vie décent aux travailleurs et à leurs
familles.
16. Le Comité note avec préoccupation l'inégalité persistante entre les salaires
des hommes et ceux des femmes, ces derniers représentant environ 75 % des
salaires masculins.
17. Le Comité note avec préoccupation que le problème de la violence conjugale
n'est pas suffisamment traité et que le Code pénal tchèque ne contient aucune
disposition spécifique protégeant les femmes contre ce type de violence.
18. Le Comité est préoccupé par l'expansion de la traite des femmes et l'exploitation
sexuelle des enfants.
19. Le Comité est profondément préoccupé par la forte pénurie de logements
et la privatisation de plusieurs parcs de logements publics qui ont provoqué
une forte augmentation des loyers et accru le nombre d'expulsions et de sans-abri.
20. Le Comité est également préoccupé par l'insuffisance des mesures prises
pour garantir une vie décente aux personnes handicapées, notamment celles
qui souffrent d'un handicap mental.
21. Le Comité est profondément préoccupé par l'incidence élevée du tabagisme,
de la toxicomanie et de l'alcoolisme, en particulier parmi les enfants et
les jeunes.
22. Le Comité note avec préoccupation que l'épidémie du VIH/sida s'étend,
en particulier parmi les jeunes.
23. Le Comité est profondément préoccupé par la surreprésentation des enfants
roms dans les «écoles spéciales» conçues à l'origine pour les enfants souffrant
d'une déficience mentale, qui conduit à la discrimination raciale, à une éducation
de qualité inférieure à la norme, et à la stigmatisation du handicap mental.
24. Le Comité est préoccupé par la diminution constante des dotations budgétaires
en faveur de l'éducation et des conséquences de cette situation sur l'exercice
du droit à l'éducation.
SUGGESTIONS ET RECOMMANDATIONS
32. Le Comité recommande à l'État partie de ratifier en particulier les Conventions
de l'OIT no 2 sur le chômage, no 81 sur l'inspection du travail, no 117 sur
la politique sociale, no 118 sur l'égalité de traitement, no 138 sur l'âge
minimum d'admission à l'emploi, no 174 sur la prévention des accidents industriels
majeurs, et no 182 sur l'interdiction des pires formes de travail des enfants.
33. Le Comité demande à l'État partie de prendre des mesures efficaces pour
réduire le taux de chômage, en particulier parmi les Roms, les femmes et les
autres groupes vulnérables.
34. Le Comité invite instamment l'État partie à réexaminer périodiquement
le montant du salaire minimum afin d'assurer un niveau de vie décent aux travailleurs
et à leurs familles.
35. Le Comité invite instamment l'État partie à intensifier ses efforts pour
lutter contre l'inégalité entre les sexes et à prendre des mesures efficaces,
d'ordre législatif ou autre, pour veiller à ce que les femmes participent
entièrement et sur un pied d'égalité au marché du travail, notamment en ce
qui concerne le principe «à travail égal, salaire égal».
36. Le Comité demande à l'État partie d'adopter une législation spécifique
sur la violence dans la famille.
37. Le Comité invite instamment l'État partie à adopter des mesures efficaces
contre la traite des femmes et l'exploitation sexuelle des enfants.
38. Le Comité invite instamment l'État partie à prendre des mesures efficaces
pour résoudre: a) le problème de la pénurie de logements en adoptant des programmes
de construction de logements, en particulier pour les groupes désavantagés
et marginalisés; b) le problème des expulsions et des sans-abri en respectant
les observations générales du Comité nos 4 et 7 et en élaborant un plan d'action
global de lutte contre le phénomène des sans-abri.
39. Le Comité encourage l'État partie à adopter une stratégie nationale de
la santé.
40. Le Comité recommande à l'État partie d'adopter des mesures efficaces pour
garantir des conditions de vie décentes aux personnes handicapées. Le Comité
demande à l'État partie de rendre compte dans son deuxième rapport périodique
des lois et mesures adoptées concernant les personnes handicapées, notamment
les handicapés mentaux, en fournissant en particulier des indications sur
le nombre de personnes hospitalisées, les installations mises à leur disposition
et les garanties juridiques de la protection des patients.
41. Le Comité demande à l'État partie d'adopter des mesures efficaces pour
réduire le tabagisme, la toxicomanie et l'alcoolisme, en particulier parmi
les enfants.
42. Le Comité recommande à l'État partie de se conformer aux normes figurant
dans les directives internationales sur le VIH/sida et les droits de la personne
adoptées lors de la deuxième Consultation internationale sur le VIH/sida et
les droits de la personne, en septembre 1996.
43. Le Comité recommande à l'État partie d'envisager d'accroître les dotations
budgétaires en faveur de l'éducation.
44. Le Comité invite instamment l'État partie à prendre des mesures immédiates
et efficaces pour éliminer la discrimination à l'encontre des enfants roms,
en cessant de les scolariser dans des «écoles spéciales» et en les intégrant
au système éducatif classique.
45. Le Comité encourage l'État partie à dispenser dans les établissements
scolaires une éducation dans le domaine des droits de l'homme à tous les niveaux
et à sensibiliser davantage les fonctionnaires et les magistrats aux questions
relatives aux droits de l'homme, en particulier aux droits économiques, sociaux
et culturels.
46. Le Comité demande à l'État partie de l'informer dans son deuxième rapport
périodique sur les mesures prises pour mettre en œuvre ses observations
finales. Il encourage également l'État partie à continuer de faire appel à
des organisations non gouvernementales et à d'autres membres de la société
civile pour l'élaboration de son deuxième rapport périodique.
47. Enfin, le Comité demande à l'État partie de présenter son deuxième rapport
périodique le 30 juin 2007, au plus tard.