Objet du module
24
Ce module a pour
objet de fournir une idée densemble
sur certains mécanismes internationaux
de protection et dapplication
des droits ESC.
Ce module
-
présente
les organismes et mécanismes des
droits humains fondés sur des traités,
et dautres fondés sur la Charte
des Nations Unies;
-
fait
le point sur les travaux et procédures
des organes clés de traités liés
aux droits ESC, notamment:
-
le
Comité des droits économiques,
sociaux et culturels,
-
le
Comité pour lélimination
de la discrimination à légard
des femmes,
-
le
Comité des droits de lenfant,
-
le
Comité des droits de lhomme;
-
fait
le point sur les travaux et procédures
des organismes et mécanismes fondés
sur la Charte des Nations Unies
et liés aux droits ESC, notamment:
-
la
Commission de la condition de
la femme,
-
la
Commission des droits de lhomme
des Nations Unies, et
-
la
Sous-commission des Nations
Unies de la promotion et de
la protection des droits de
lhomme,
-
fait le point sur les
travaux et procédures de lOrganisation
internationale du travail.
Introduction
Les institutions et
procédures nationales doivent être
efficaces afin protéger les droits
ESC dans leur intégralité. Les actions
entreprises auprès des institutions,
organismes et mécanismes internationaux
ne peuvent que compléter la protection
fournie par ces organismes et processus;
elles ne remplacent pas les travaux
effectués au niveau national.
En même temps, plusieurs
institutions, mécanismes et procédures
internationaux ont un rôle à jouer
dans la réalisation des droits ESC.
La plupart dentre eux font partie
du système des Nations Unies. Ce
module en récapitule brièvement les
plus importants:
Le Comité
des droits économiques, sociaux et
culturels
Le Comité
pour lélimination de la discrimination
à légard des femmes
Le Comité
des droits de lenfant
Le Comité
des droits de lhomme
La Commission
de la condition de la femme
La Commission
des Nations Unies des droits de lhomme
La Sous-commission
des Nations Unies de la promotion
et la protection des droits de lhomme
LOrganisation
internationale du travail
Les mécanismes des
traités
Lapplication
des traités sur les droits humains
ne peut être la responsabilité
des États seuls. Il doit y avoir
une forme dobservation indépendante,
même pour les États dévoués aux droits
humains. Par conséquent, les traités
sur les droits humains fournissent
à léchelon universel un certain
mécanisme d« application »
ou de « surveillance » généralement
contrôlé par un comité indépendant
(dans le cas des traités des Nations
Unies), une commission ou un tribunal.
Chaque traité des Nations Unies dont
il est question dans ce module possède
son propre « organisme »
ou comité chargé dentreprendre
plusieurs tâches relatives à sa mise
en uvre.
Les mécanismes dapplication ou
de surveillance des traités sur les
droits humains se présentent sous
lune des deux formes suivantes:
un système de rapport ou un système
de pétition. Dans certains cas, ils
sont tous deux combinés. Le système
de rapport constitue le mécanisme
standard de supervision des traités
des Nations Unies. Dans ce système,
les États parties soumettent régulièrement
au comité des Nations Unies concerné
un rapport sur les progrès réalisés
et les problèmes rencontrés lors de
la mise en uvre du traité.
Les comités examinent ces rapports
au cours de leurs réunions annuelles.
Ces examens prennent habituellement
la forme de ce que lon appelle
un « dialogue constructif »,
au cours duquel les représentants
de lÉtat concerné sont invités
à participer à une réunion du comité
afin de présenter le rapport de lÉtat
et répondre aux questions des membres
du comité. Les comités se pencheront
souvent sur les problèmes qui leurs
sont soumis par les organisations
non-gouvernementales (ONG) et sattacheront
à obtenir lassurance des États
concernés quils affronteront
et corrigeront les problèmes. À lissue
du « dialogue constructif »,
le comité adopte un ensemble d«
observations finales » décrivant
non seulement les progrès réalisés,
mais aussi les points préoccupants
quil convient daborder.
Lautre modèle
surveillance est le système de pétitionappelé
également « système de plainte »
ou « système de communication »,
forme prédominante de contrôle dans
les systèmes régionaux. Les systèmes
de pétition sont également exploités
par plusieurs comités des Nations
Unies (Comité des droits de lhomme,
Comité contre la torture et Comité
pour lélimination de la discrimination
raciale). LAssemblée générale
des Nations Unies a adopté un autre
système de pétition pour le CEDAW
(Comité pour lélimination de
la discrimination à légard des
femmes), système non encore en vigueur.
Des mesures ont été prises dans
le cadre du PIDESC pour adopter un
tel système.
Les systèmes de pétition
varient en termes du statut des procédures
et du type de plaintes susceptibles
dêtre reçues. À lexception
des systèmes exploités en vertu de
la Convention européenne des droits
de lhomme (module 29) et de
la Convention américaine relative
aux droits de lhomme (module
30), les systèmes de pétition fondés
sur des traités sont facultatifs pour
les États parties et nont pas
de caractère obligatoire. Les traités
prévoient généralement la réception
de pétitions des États et/ou des particuliers,
mais la procédure de plainte inter-État
est très rarement utilisée.
Dans lensemble, les systèmes de pétition
fonctionnent de manière similaire
à celles des procédures juridiques
internes, au cours desquelles un organisme
indépendant délibère sur un litige
entre deux parties et offre comme
solution juridique une décision
ou un avis. Toutefois, à la différence
des procédures internes, les
systèmes de pétition ne sont pas un
moyen de faire appel; ils assurent
simplement que les États concernés
respectent leurs obligations issues
des traités. Les « recours »
disponibles, tels que définis en droit
interne, sont par conséquent un point
annexe de la plupart des traités sur
les droits humains. Dans tous les
cas, cest le système juridique
national qui fournit les recours
et lexamen international nintervient
que lorsque ces recours ont été
épuisés.
Procédures fondées
sur la Charte
La surveillance et
lapplication des droits humains
sont fondés sur les traités (liés
à un traité spécifique sur les droits
humains); ils sont néanmoins complétés
aux Nations Unies par plusieurs procédures
fondées sur la Charte. Ces procédures
ont été élaborées en vertu des
dispositions générales sur les droits
humains de la Charte des Nations Unies
(voir le module 2). Depuis sa création
en 1946, la Commission des droits
de lhomme des Nations Unies
a reçu des plaintes du monde entier,
déposées par des particuliers et des
organisations, concernant des mauvais
traitements infligés par des gouvernements
ou des acteurs étatiques. Elle refusa
pendant de nombreuses années dy
donner suite, mais elle élabora ultérieurement
plusieurs mécanismes qui lui permirent
de prendre certaines mesures. Les
deux principalesprocédure 1235
et procédure 1503 (nommées daprès
les résolutions du Conseil économique
et social [ECOSOC])lui permettent,
ainsi quà sa Sous-commission,
dexaminer les pétitions et dautres
informations urgentes et fournissent
également un certain nombre de mesures
de suivi, notamment des visites effectuées
dans les États et la rédaction de
comptes-rendus par pays ou par thème
effectués par des rapporteurs spéciaux,
des représentants, des experts et
des groupes de travail. Toutefois,
il sagit principalement de procédures
« politiques », dans le
sens où leur fonctionnement dépend
en dernier ressort des décisions prises
au sein de la commission elle-même
(composée dÉtats membres des
Nations Unies).
Pratiquement tous ces
organismes permettent aux ONG dintervenir
dans leurs délibérations. En fait,
sans les interventions des ONG, bon
nombre de ces mécanismes ne pourraient
fonctionner efficacement. Les ONG
nationales, régionales et internationales
sont des sources fertiles dinformation;
elles dépeignent un tableau de la
situation des droits humains dans
un pays donné qui diffère de celui
fourni par le gouvernement. Les commentaires,
observations et recommandations de
ces organes soutiennent à leur tour
les activités de lobby et les actions
des ONG.
Les sections qui suivent
passent brièvement en revue les procédures
à la disposition des militants des
droits ESC par le biais de
mécanismes
fondés sur les traités et
mécanismes
fondés sur la Charte des Nations Unies.
La dernière section
est consacrée à lOrganisation
internationale du travail, qui existait
avant les Nations Unies, mais qui
constitue à lheure actuelle
une de ses agences spécialisées.
Le Comité des droits
économiques, sociaux et culturels
Le Comité des droits
économiques, sociaux et culturels
(CDESC) est le mécanisme international
le plus important pour les militants
qui se consacrent à ces droits. (Voir
le un supplément dinformations
sur le CDESC, module 2). Etabli en
mai 1986, il suit la mise en uvre
des droits contenus dans le PIDESC.
Il se réunit deux fois par an à Genève.
Composé de dix-huit membres indépendants,
il forme un organe subsidiaire de
lECOSOC. Il suit la mise en
uvre des droits ESC de trois
façons:
en examinant
les rapports soumis par les gouvernements
et en donnant ses conclusions sur
les violations de leurs obligations
aux termes du Pacte;
en catalysant
les actions des États et celles dautres
organismes internationaux relatives
aux droits contenus dans le Pacte;
et
en clarifiant,
en élargissant et en développant les
droits contenus dans le Pacte par
le biais de ses Observations générales
et autres déclarations.
Les ONG peuvent intervenir
dans tous ces domaines et le CDESC
sest montré particulièrement
réceptif à leurs informations et idées.
Le CDESC a adopté des
directives détaillées sur la forme
et le contenu des rapports que doivent
rédiger les gouvernements aux termes
du Pacte. [1]
Bien peu dÉtats suivent toutefois
ces directives. Les procédures quobserve
le comité pour examiner les rapports
sont similaires à celles que suivent
dautres organes du traité.
Le gouvernement
soumet son rapport.
Le comité
nomme parfois lun de ses membres
pour analyser le rapport.
Plusieurs
mois avant la session formelle, un
groupe de travail de pré-session identifie
les questions à soulever avec le représentant
du gouvernement. À ce stade, les
ONG internationales, régionales et
nationales peuvent présenter des informations
au groupe de travail. Les sessions
de ce dernier ont généralement lieu
peu de temps après les sessions formelles
du comité.
Les ONG
nationales peuvent également préparer
des « contre-rapports »
ou « doubles rapports »
à soumettre au comité.
Le comité
se réunit alors avec les représentants
du gouvernement au cours dune
de ses sessions formelles (elles ont
habituellement lieu en mai et en novembre)
pour examiner en détail le rapport
du gouvernement.
Avant
cette réunion, les ONG ont la possibilité
de faire des présentations orales
devant le comité afin de compléter
leurs rapports écrits. La première
après-midi de chaque session formelle
est réservée aux présentations des
ONG sur les rapports que le comité
examinera.
Le comité
invite également les membres des organes
spécialisés des Nations Unies à faire
leurs observations.
Le comité
fournit alors ses observations finales
sur le rapport du gouvernement et
lui adresse ses recommandations en
ce qui concerne ses obligations aux
termes du Pacte. Ces observations
sont soumises au gouvernement concerné
et rendues publiques.
Le débat
sur chaque rapport de gouvernement
est récapitulé dans le rapport annuel
du comité présenté à lECOSOC.
Observations générales
Outre lexamen
détaillé des rapports des gouvernements,
le comité peut adopter une Observation
générale ou rédiger un exposé analytique
ou une déclaration qui tente délargir
la compréhension des droits contenus
dans le Pacte ou de traiter un sujet
pertinent. Lobjectif des Observations
et exposés généraux est daider
les gouvernements à mettre en uvre
les droits couverts dans le Pacte,
de souligner les déficiences dans
les rapports adressés et daméliorer
les procédures de présentation de
rapports. Le comité adopta, en juin
2000, 13 Observations générales dont
les deux dernières traitent du droit
à léducation et du droit à une
alimentation adéquate.
Le comité espère également
que ses Observations et exposés catalyseront
les actions des États dans les domaines
des droits ESC, ainsi que celles des
organes spécialisés des Nations Unies
et autres organismes internationaux,
afin de faire progresser la réalisation
de ces droits.
Rapports ad hoc
Le comité a également
pris des mesures lorsque la situation
exigeait une réaction immédiate.
Il a demandé des rapports ad hoc à
la République dominicaine et aux Philippines.
Il a entrepris en 1995 une mission
dobservation à Panama afin dobtenir
des informations de première main
sur le droit au logement. Cette mission fut
entreprise avec la permission du gouvernement
de Panama.
Empêcher les infractions
Dans un cas au moins
le comité a empêché une violation
dêtre commise. À lexamen
des informations présentées par les
ONG philippines, il décida que léviction
forcée, prévue, dun large groupe
de personnes constituerait une infraction
des obligations de ce gouvernement
aux termes du Pacte. Il recommanda
par conséquent de ne procéder à léviction
que si un plan de réinstallation approprié
était mis en place.
Les visites des
membres du CDESClexpérience
de Hong Kong
Lorsquen 1997
Hong Kong soumit son rapport aux termes
du PIDESC, les ONG organisèrent la
visite à Hong Kong du membre du comité
responsable de ce rapport afin de
dialoguer avec les ONG locales avant
que le comité nexamine le rapport
du gouvernement. Cette visite devait
permettre au comité davoir un
compte-rendu de première main sur
la situation relative aux droits ESC
dans ce pays.
Journée de discussion
générale
Le comité réserve également
du temps pour délibérer sur un droit
ou un article du Pacte ou sur une
question spécifique entrant dans le
cadre de ses travaux. Il invite généralement
des experts à participer à ces discussions.
Par exemple, lors de sa dix-huitième
session en mai 1998, il organisa dabord
une Journée de discussion générale
sur le sujet « La mondialisation
et son impact sur la jouissance des
droits économiques et sociaux ».
Des représentants dorganes des
Nations Unies, dorganes spécialisés
et de plusieurs ONG y participèrent.
À lissue de la discussion, le
comité adopta une déclaration intitulée:
« La mondialisation et les droits
économiques, sociaux et culturels ».
Protocole facultatif
Le comité a examiné
également une proposition dadoption
dun Protocole facultatif du
Pacte, qui permettrait aux particuliers
et aux groupes de lui soumettre leurs
demandes directement en cas de violation
du Pacte.
Action
pour les droits socio-économiques-le
recours au droit international
L'expérience du Centre
for Equality Rights in Accommodation
(Centre canadien pour les droits
à l'égalité
du logement) (CERA)
" Ceux d'entre nous qui
travaillent avec des personnes
vivant dans la pauvreté
ont souvent besoin de rappeler
que la question des droits sociaux
et économiques n'est
pas l'apanage du Comité
des Nations Unies lorsqu'il
se réunit dans les halls
de marbre du Palais des Nations
à Genève, l'une
des villes les plus prospères
et chères du monde. Pour
la majorité de ceux qui
luttent pour les droits sociaux
et économiques, les procédures
des organes de surveillance
du traité des Nations
Unies peuvent sembler totalement
hors de propos ou reléguer
ces droits aux " spécialistes
internationaux " au lieu
de les développer en
tant que partie intégrante
des droits nationaux.
" Ce serait néanmoins
une erreur pour les activistes
des droits sociaux et économiques
d'ignorer le potentiel que représente
le recours aux organes de surveillance
du traité des Nations
Unies, en particulier le CDESC,
pour renforcer la pratique des
droits sociaux à l'intérieur
d'un pays. Comme tous les organes
voués aux droits humains,
et peut-être plus que
d'autres, nous devons travailler
simultanément sur un
certain nombre de fronts à
la fois. L'action politique
sera souvent renforcée
par des actions en justice,
et ces dernières seront
accompagnées de campagnes
d'information à destination
du public et d'autres actions.
De même, les actions pour
les droits sociaux à
l'intérieur d'un pays
peuvent progresser grâce
au travail au niveau international,
qui doit à son tour être
informé par les groupes
d'action nationaux . . .
" En 1993, lorsque le
deuxième rapport périodique
du Canada devait être
examiné, les ONG canadiennes
. . . demandèrent au
Comité une nouvelle procédure
qui intègrerait leurs
présentations orales
dans le nouveau processus d'examen
périodique. Le Comité
décida d'innover et réserva
au début de chaque session
un certain temps pour les présentations
des ONG relatives aux examens
périodiques des États
parties. La nouvelle procédure
eut un impact considérable,
car elle permit aux ONG de jouer
un rôle crucial et de
transformer fondamentalement
la nature du processus d'examen
. . .
" Les soumissions des
ONG auprès des organes
de surveillance du traité
sont souvent désignées
par " doubles rapports
", mais en 1993 le CDESC
fit sortir de l'ombre le rôle
des ONG. Au lieu de prétendre
avoir les ressources ou les
spécialistes permettant
d'évaluer des questions
sociales et économiques
complexes dans un pays, le Comité
reconnut fonctionner au mieux
dans une fonction plus juridictionnelle
en animant un dialogue entre
ONG nationales et gouvernements,
puis en tirant ses conclusions
. . .
" Le rôle éminent
que jouèrent en 1993
les ONG en examinant la mise
en oeuvre du Pacte par le Canada
rendit le processus tout à
fait transparent et en fit le
sujet de nombreux débats
publics. Les préoccupations
et recommandations du Comité
firent les gros titres de la
presse du pays, furent l'objet
de débats animés
au Parlement et furent communiquées
avec enthousiasme par les groupes
des droits humains et de lutte
contre la pauvreté de
tout le Canada. Elles furent
par la suite citées dans
les plaidoiries de nombreuses
affaires dans le cadre de la
Charte canadienne des droits
et libertés et de la
législation sur les droits
humains . . .
" En 1993, les présentations
orales des ONG avaient trait
à deux principaux thèmes
qui continuaient de dominer
l'action pour les droits sociaux
et économiques au Canada:
(1) l'augmentation de la pauvreté,
des personnes sans-abri et de
la faim en plein cur de
la prospérité;
et (2) l'incapacité des
cours et gouvernements du Canada
à fournir des recours
efficaces contre les violations
de ces droits. Nous avons fourni
des informations concises sur
l'ampleur et l'intensité
de la pauvreté des groupes
vulnérables au Canada-tirées
généralement de
données fournies par
le gouvernement-et nous avons
illustré cela avec des
mesures comparables de l'étendue
de la richesse et des "
ressources disponibles "
de cette nation. Notre présentation
était accompagnée
de diapositives montrant les
formes que prenait la pauvreté
et la situation des personnes
sans-abri au Canada. Nous avons
également fourni des
récapitulatifs des affaires
concernant les droits sociaux
et économiques présentées
devant les cours canadiennes
et les tribunaux des droits
humains.
" Les observations finales
du Comité couvraient
la plupart des questions que
nous lui avions soumises et
qui concernaient directement
nos luttes internes. Le Comité
adressa pour la première
fois un blâme sévère
à un pays prospère
pour violation des droits sociaux
et économiques. Il exprima
sa conviction que la doctrine
de " réalisation
progressive " est autant
une épée qu'un
bouclier. Cette doctrine peut
servir à tenir les pays
pour responsables s'ils n'appliquent
pas " le maximum des ressources
disponibles " pour faire
respecter les droits sociaux
et économiques . . .
" Tout aussi importante
était la déclaration
sans équivoque du Comité
concernant l'obligation de fournir
des recours efficaces pour tous
les droits du Pacte, en particulier
le droit à un niveau
de vie adéquat stipulé
dans l'article 11.
" . . . Le Comité
fit remarquer que, même
sans la protection explicite
des droits sociaux et économiques
dans la Charte du Canada, bon
nombre de ces droits peuvent
être protégés
par le biais d'interprétations
élargies des droits à
" l'égalité
" et à la "
sécurité de la
personne ", par exemple
. . .
" Si les observations
du Comité des Nations
Unies ont été
largement publiées au
Canada, la réponse du
gouvernement fut extrêmement
décevante. Au lieu de
faire appliquer ces recommandations
ou de répondre aux préoccupations
du Comité, le Canada
a fait marche arrière
en ce qui concerne la mise en
oeuvre des droits du Pacte .
. .
" Le résultat le
plus tragique des événements
récents fut la décision
du gouvernement fédéral
de révoquer en 1995 les
dispositions du Régime
d'assistance publique du Canada
(RAP) qui avait représenté
pour des générations
de Canadiens le pilier de la
protection des droits sociaux...
" Lorsque le gouvernement
canadien annonça son
intention de révoquer
les dispositions du RAP, les
ONG et les spécialistes
juridiques internationaux s'adressèrent
au comité parlementaire
qui examinait la législation
proposée. Ils déclarèrent
que cette mesure constituerait
une infraction du Canada à
ses obligations aux termes du
Pacte, selon l'interdiction
de prendre " des mesures
délibérément
régressives ", relatives
à la protection des droits
du Pacte. Comme le gouvernement
semblait y prêter peu
d'attention, nous présentâmes
une requête directe au
Comité des Nations Unies,
qui offrait la possibilité
de faire des présentations
orales sur la question. En mai
1995, une délégation
des ONG canadiennes parut devant
le Comité, en dehors
du processus régulier
d'examen périodique,
et présenta une requête
urgente demandant au Comité
d'aborder la question. Le Comité
répondit en envoyant
au gouvernement canadien une
lettre transmettant les soucis
des ONG et demandant de soumettre
dans l'année un rapport
sur la législation, dans
le contexte du troisième
rapport périodique du
Canada. Aucun rapport ne fut
présenté pendant
deux ans et demi, puis le gouvernement
adressa finalement son rapport
périodique, qui fut examiné
en novembre 1998. Pendant ce
temps, les programmes d'assistance
sociale dans les provinces s'étaient
considérablement dégradés.
" . . . Six mois avant
la date prévue pour l'examen
du rapport périodique
d'un gouvernement par le Comité,
un groupe de travail de pré-session
se réunit et dresse une
liste de questions à
envoyer à l'État
partie. Les organisations non
gouvernementales peuvent soumettre
à ce groupe de travail
des présentations orales
ou écrites. Il s'agit
là d'une importante occasion
de s'assurer que la liste contient
les préoccupations les
plus cruciales des ONG, car
elle servira de structure à
l'examen oral lors de la session
suivante. Deux d'entre nous,
représentant un grand
nombre de ONG canadiennes, furent
envoyés à Genève
en mai 1998 pour informer le
groupe de travail de pré-session.
Ce dernier envoya à son
tour au Canada une longue liste
de questions, qui couvraient
entre autres la révocation
du Régime d'assistance
publique.
" Le jour de l'ouverture
de la réunion de novembre-décembre
1998 du Comité, au cours
de laquelle le Canada et Israël
devaient être examinés,
la salle était littéralement
envahie par les ONG-une douzaine
à peu près d'ONG
canadiennes, au moins le même
nombre d'ONG palestiniennes,
et quelques ONG d'autres pays
examinés. Il semblait
approprié que ce soit
le Président, Philip
Alston, qui présidait
sa dernière session du
Comité, qui intervienne
dans la confusion. Il avait
toujours défendu le rôle
des ONG et avait joué
un rôle majeur dans la
transformation du Comité
en organe plus militant pendant
la dernière décennie.
" Le rôle le plus
visible des ONG apparaît
lors des présentations
orales et de la soumission d'exposés
écrits au début
de la session du Comité.
Toutefois, comme pour tous les
autres organes de surveillance
du traité, il est capital
d'adresser des exposés
aux membres individuels du Comité
sur des questions qui présentent
pour eux un intérêt
particulier. Etant donné
qu'ils sont généralement
inondés d'informations,
il convient de leur présenter
de brefs récapitulatifs.
Les ONG canadiennes avaient
préparé un récapitulatif
collectif des questions les
plus essentielles, qui se révéla
précieux pour aider le
Comité à procéder
à son examen. Etant donné
que les ONG ne peuvent répondre
aux exposés des gouvernements,
il est important d'anticiper
la manière dont un gouvernement
répondra aux questions
et de fournir aux membres du
Comité des informations
pertinentes prouvant pourquoi
la réponse anticipée
est inadéquate. Vu les
réponses écrites
du gouvernement, nous avions
anticipé correctement
que la délégation
gouvernementale nierait l'importance
des prestations du Régime
d'assistance publique et le
décrirait comme n'étant
qu'une " entente administrative
" entre le gouvernement
fédéral et les
provinces, qu'il convenait de
" mettre à jour
". Nous avions par conséquent
insisté dans nos documents
sur les présentations
précédentes qu'avait
faites le Canada lors des examens
périodiques, ainsi que
sur d'autres exposés
officiels, qui décrivaient
le Régime d'assistance
publique comme étant
fondamental à la protection
des droits sociaux et économiques,
ainsi qu'aux normes nationales
des programmes d'assistance
sociale. Les membres du Comité
exigèrent donc de la
délégation canadienne
qu'elle réconcilie ses
présentations précédentes
avec ses dénégations
actuelles. L'un des membres
demanda même à
un délégué
canadien: 'Mentiez-vous alors
ou mentez-vous maintenant?'
" Les ONG avaient effectué
des travaux d'approche considérables
auprès des médias
canadiens. Des reporters des
quotidiens nationaux et de la
radio nationale assistaient
à cet entretien de deux
jours entre le Comité
et les délégués
du gouvernement canadien. Des
ONG de tous les secteurs rédigèrent
des communiqués de presse
et nous établîmes
des sites Internet contenant
le rapport du gouvernement,
la liste des questions et les
présentations des ONG.
Le processus d'examen fut amplement
couvert par les médias
et fut commenté au Canada-une
émission télévisée
nationale présenta même
un sketch comique des dénégations
du gouvernement!
" En substance, les observations
finales de 1998 sur le Canada
réitéraient et
renforçaient les préoccupations
et les recommandations exprimées
lors de l'examen précédent;
elles contenaient également
un blâme sévère
de la révocation du Régime
d'assistance publique...
" Le Comité recommandait
le rétablissement d'un
" droit juridiquement exécutoire
à une assistance adéquate
pour toutes les personnes dans
le besoin " et de toutes
les autres normes du Régime
d'assistance publique.
" Le Comité exprima
également ses vives préoccupations
et ses recommandations concernant
nombre d'autres questions au
Canada, notamment: les réductions
des taux d'assistance sociale
dans les provinces, l'inactivité
vis-à-vis du nombre croissant
des sans-abri, la dépendance
croissante vis à vis
des banques alimentaires, les
réductions de l'assurance-chômage,
l'inaction dans le cadre des
revendications territoriales
des autochtones et la pauvreté
existant parmi ces groupes,
les programmes de travail obligatoire
(en échange de l'allocation
de chômage), les obstacles
à la syndicalisation
des travailleurs dans ces programmes,
ainsi que les conséquences
désastreuses des coupes
dans ces programmes pour les
femmes.
" Les gouvernements provinciaux
furent à nouveau critiqués
pour avoir soutenu devant la
cour que la Charte canadienne
des droits et libertés
devait être interprétée
comme refusant les recours juridiques
à ceux dont les droits
sociaux et économiques
avaient été violés.
Le Comité réitéra
que 'les droits sociaux et économiques
ne doivent pas être relégués
au niveau des principes et des
objectifs'. Il demanda instamment
de rendre exécutoires
les droits du Pacte dans les
provinces et les territoires
'par la législation ou
par des mesures politiques,
ainsi que par l'établissement
des mécanismes indépendants
et appropriés de suivi
et de décision' . . .
" En mars 1999, les ONG
canadiennes qui se consacraient
à la pauvreté
et aux sans-abri décidèrent
de participer à l'examen
quinquennal, effectué
par le Comité des droits
de l'homme des Nations Unies,
qui évaluait si le Canada
respectait le Pacte international
des droits civils et politiques.
Il est à noter que ce
Comité émit des
inquiétudes semblables
à celles du Comité
des droits économiques,
sociaux et culturels . . . Il
exprima en particulier son souci
devant l'ampleur du phénomène
des sans-abri au Canada et recommanda
au gouvernement de 'prendre
les mesures positives requises
par l'article 6 (le droit à
la vie) afin de remédier
à ce grave problème'
. . .
" Par des actions menées
au niveau international, nous
avons commencé à
esquisser parmi les organes
de surveillance du traité
des Nations Unies un consensus
sur les violations des droits
humains qui ont lieu au Canada.
Ce faisant, nous avons également
encouragé ces organes
à aborder d'importantes
questions sur les droits sociaux
et économiques qui auraient
sinon été ignorées.
Si, à ce stade, nous
n'avons pas réussi à
inverser l'érosion des
droits sociaux au Canada, nous
avons au moins trouvé
un forum qui nous permet de
formuler les revendications
les plus importantes sur ces
droits et de les faire examiner
équitablement à
la lumière du droit international
sur les droits humains . . .
"2
|
Le Comité pour lélimination de la discrimination
à légard des femmes (CEDAW)
Le CEDAW suit la mise
en uvre et la réalisation des
droits stipulés dans la Convention
sur lélimination de toutes les
formes de discrimination à légard
des femmes.3
La Convention contient
plusieurs articles à fond socio-économique:
les gouvernements sont tenus déliminer
la discrimination dans un certain
nombre de domaines, notamment léducation
(art. 10), lemploi (art. 11),
les soins médicaux et le planning
familial (art.12), ainsi que les prestations
économiques et sociales (art. 13).
(Voir le supplément dinformations
sur la Convention sur les femmes et
le CEDAW dans le module 4).
Outre effectuer le suivi de lapplication
des dispositions de la convention
par les gouvernements, le comité
fait également des suggestions et
des Recommandations générales. Les
suggestions sont adressées au système
des Nations Unies. Les Recommandations
générales, comme celles des autres
organes des traités, sont destinées
à clarifier les dispositions densemble
de la convention et à les développer.
Leur objectif est daider les
gouvernements, les ONG et autres à
interpréter les différents articles
de la convention. Au mois de juin
2000, le comité avait émis vingt-quatre
Recommandations générales.
Le comité se compose
de vingt-trois experts de différentes
régions géographiques qui remplissent
des mandats de quatre ans agissant
selon leurs compétences propres.
Le CEDAW a adopté des
directives que doivent suivre les
États parties pour soumettre leurs
rapports conformément aux termes de
la convention.4
En vertu de larticle
18, chaque État partie convient de
présenter un rapport sur les mesures
législatives, judiciaires, administratives
et autres quil a adoptées pour
faire appliquer les dispositions
de la convention et sur les progrès
accomplis à cet effet. Les ONG peuvent
fournir des informations lorsque les
gouvernements présentent leurs
rapports. (Voir lencart figurant
aux pp. 495-96 de ce module, un exemple
des activités des ONG relatives aux
réunions du comité.)
Voici une description
des procédures que suit le comité
pour examiner les rapports:
Présentation
du rapport du gouvernement: Le gouvernement
présente un rapport sur les mesures
quil a prises pour mettre en
uvre la Convention. Le premier
rapport est dû dans lannée qui
suit la mise en vigueur de la Convention
dans le pays; par la suite, les rapports
sont adressés tous les quatre ans.
Groupe
de travail de pré-session: Le rapporteur
du paysun membre du CEDAW responsable
de ce paysprépare une analyse
du rapport du gouvernement. Il/elle
envoie son analyse au groupe de travail
de pré-session. Ce dernier, qui se
réunit avant la réunion formelle du
comité, reçoit également les questions
des autres membres du comité et dresse
une liste écrite de questions quil
envoie au gouvernement. À ce stade,
les ONG peuvent adresser des documents
au groupe de travail et peuvent être
invitées à assister à sa réunion pour
le présenter leurs observations.
Réunion
publique avec le gouvernement: Le
comité au complet se réunit alors
jusquà trois fois avec les représentants
du gouvernement (chaque réunion dure
environ trois heures), qui doivent
répondre aux questions écrites du
comité et à toute question supplémentaire
posée.
Adoption
des observations finales: À lissue
des réunions avec les représentants
du gouvernement, le comité adopte
les observations finales, un document
de 3 à 5 pages qui récapitule son
évaluation des progrès accomplis pour
faire appliquer la convention, des
principaux secteurs problématiques,
ainsi que des recommandations détaillées
sur les mesures que doit prendre
le gouvernement. Ce document, fourni
au gouvernement à la fin de la session
du comité, est rendu public peu après.
Les observations finales
fournissent aux ONG un outil de lobbying
au niveau national. Elles peuvent
servir à influer sur les actes et
la politique dun gouvernement.
Il arrive parfois que le comité demande
des informations supplémentaires ou
un autre rapport.
Recommandations
générales
Outre les observations
finales sur les rapports des États
membres, le comité établit également
des Recommandations générales. Les
ONG peuvent contribuer à ces recommandations
en organisant des lobbies auprès des
membres du comité et par le biais
des présentations quelles soumettent
au groupe de travail de pré-session.
Les Recommandations générales, en
soulignant les dispositions de la
convention, fournissent par conséquent
un autre outil de lobbying efficace.
Protocole facultatif
En décembre 1999, lAssemblée
générale adopta un protocole facultatif
du CEDAW. Lorsquil entrera
en vigueur, il permettra aux femmes
sujettes à une discrimination dans
leur pays de déposer une demande directe
auprès du comité si elles ont épuisé
les recours locaux. Il permettra
également au comité de mener des enquêtes
sur les violations systématiques ou
graves de la convention. Les États
membres pourront- toutefois choisir
de ne pas accepter cette dernière
procédure.
Le Comité des droits
de lenfant
Le Comité des droits
de lenfant est un organe qui
suit la mise en uvre de la Convention
relative aux droits de lenfant
(CDE). (Voir au module 5 un exposé
détaillé sur la CDE.) Il se compose
dun panel de dix experts indépendants.
Outre sa fonction de suivi, il a reçu
le mandat de recueillir le soutien
et la coopération internationaux pour
aider les pays en voie de développement
à promouvoir les droits de lenfant.
Il a établi ses propres
règles de procédure et a élaboré des
directives pour aider les États parties
à adresser leurs rapports. Un État
partie adresse un rapport initial
deux ans après sa ratification, puis
tous les cinq ans par la suite. Le
CDE est habilité à demander « des
conseils experts sur lapplication
de la Convention à des organismes
spécialisés, au Fonds des Nations
Unies pour lenfance et autres
organes compétents ». Les ONG
ont été considérées comme faisant
partie des « autres organes compétents ».
Le comité nomme généralement
lun de ses membres comme rapporteur
lorsquun pays adresse son rapport.
Par ailleurs, le groupe de travail
de pré-session identifie les questions
à soulever avec le gouvernement concerné.
Une fois que le rapport du gouvernement
est présenté, les ONG sont autorisées
à répondre par écrit. Seules celles
qui adressent des informations écrites
sont autorisées à assister aux sessions
du groupe de travail de pré-session.
Le Groupe des ONG pour le Comité des
droits de lenfant anime la participation
des ONG dans la procédure du
Comité.
Lors de la réunion
du groupe de travail de pré-session,
le rapporteur du pays (membre du comité
chargé du rapport de ce pays) donne
une brève présentation du rapport.
Les ONG peuvent intervenir à ce stade
et faire une présentation orale au
groupe de travail. Les membres des
organes spécialisés peuvent également
fournir leurs observations à ce moment
là.
En se basant sur la
réunion du groupe de travail de pré-session,
le comité détermine une liste de questions
à clarifier par le gouvernement concerné.
Les ONG ne participent pas aux sessions
formelles du comité, mais elles sont
autorisées à y assister. À lissue
de la réunion avec les représentants
du gouvernement, le comité donne ses
observations finales, qui sont rendues
publiques.
Le Comité des droits
de lhomme
Certains droits du
PIDCP possèdent des caractéristiques
des droits ESC et le Comité des droits
de lhomme la parfois reconnu.
Les articles suivants du PICDP ont
joué un rôle important dans ce contexte:
Larticle
6, qui protège le droit à la vie
Larticle
8, qui interdit lesclavage,
le commerce desclaves, la servitude
et le travail forcé
Larticle
12, qui garantit la liberté de se
déplacer et de choisir son lieu de
résidence
Larticle
17, qui offre une protection contre
lingérence arbitraire ou illégale
dans la vie privée, la famille et
le foyer dune personne
Larticle
12, qui garantit la liberté de pensée,
de conscience et de religion
Larticle
22, qui garantit la liberté de sassocier,
le droit de former un syndicat et
den faire partie
Larticle
26, qui garantit légalité devant
la loi et légalité de protection
de la loi
Larticle
27, qui garantit aux minorités le
droit de jouir de leur culture, de
pratiquer leur religion et dutiliser
leur propre langue
(Voir dans le module
22 une illustration de la manière
dont certains droits civils et politiques
ont acquis une dimension socio-économique
par un processus dinterprétation.)
Le CEDAW
et les groupes de femmes indiens
L'Inde ratifia le CEDAW en
juillet 1993, peu après
la Conférence mondiale
de Vienne sur les droits de
l'homme. Cet événement
résultait clairement
de la pression et de l'influence
exercées au cours de
la Conférence par les
groupes des droits de la femme.
Le CEDAW devint par la suite
une composante cruciale pendant
la préparation de la
Conférence sur les femmes
qui eut lieu à Pékin
en septembre 1995. Plusieurs
ateliers d'orientation furent
organisés sur le CEDAW.
Un " double rapport "
détaillé fut préparé
avec la contribution de groupes
de femmes dans tout le pays,
avant le rapport initial du
gouvernement indien au CEDAW,
dû en août 1994.
Les ateliers d'orientation
initiaux sur le CEDAW furent
difficiles. Spécialistes
et participants eurent des difficultés
à l'intégrer aux
actions populaires. Au fil des
ans, les ateliers s'orientèrent
davantage sur les " concepts
" et le travail de groupe
s'attacha à lier la loi
et la politique aux études
de cas locales. Le CEDAW put
ainsi se transformer en un outil
de suivi des travaux de communautés
au lieu de rester au stade de
texte du droit international.
En 1997, International Women's
Rights Action Watch (IWRAW)
d'Asie et du Pacifique entreprit
avec certains partenaires nationaux
un projet de suivi par le CEDAW.
Ces mesures, alliées
au long délai que prit
le gouvernement indien pour
préparer son rapport
initial, permirent de populariser
le CEDAW et de créer
des systèmes de suivi.
Au cours de cette période,
la Cour suprême indienne
prit également des décisions
notoires en citant le CEDAW,
fait qui souligna son bien-fondé
et le potentiel qu'il avait
de transformer les normes et
pratiques intérieures
en cours à cette époque.
Les groupes locaux appliquèrent
eux aussi le CEDAW, le citant
auprès des administrations
régionales pour exprimer
leur désaccord sur leurs
pratiques et faire valoir leurs
revendications, ce qu'ils firent
avec succès.
En 1999, lorsque le gouvernement
indien présenta son rapport
initial au comité du
CEDAW, les groupes de femmes
s'attachèrent avec enthousiasme
à préparer un
contre-rapport ou " double
rapport ". Un grand nombre
des groupes qui avaient préparé
la conférence de Pékin
et y avaient participé,
qui appréciaient à
la fois le bien-fondé
des lobbies du système
international et le recours
aux mécanismes du droit
international, entreprirent
un effort commun coordonné
par le National Alliance of
Women (NAWO) avec l'assistance
de l'IWRAW d'Asie et du Pacifique.
Ce rassemblement ne signifiait
toutefois pas que tous les groupes
de femmes en Inde-ou même
tous les groupes qui avaient
participé à la
rédaction du contre-rapport-avaient
une foi totale dans le CEDAW
ou les processus internationaux.
Le scepticisme sur le bien-fondé
du droit international subsistait,
mais la grande majorité
des soixante organismes qui
se réunirent sentaient
qu'il était important
d'avoir recours aux moyens de
lobbying disponibles pour exercer
une pression sur le gouvernement.
Un atelier fut organisé
en novembre 1999 au niveau national
afin de parler des modalités
de la préparation d'un
contre-rapport. Les objectifs
étaient les suivants:
1. Avoir recours au cadre et
aux processus du CEDAW pour
exercer une pression sur le
gouvernement afin qu'il prenne
des mesures dans certains secteurs
négligés des droits
de la femme
2. Responsabiliser le gouvernement
vis-à-vis des engagements
qu'il avait pris lors de la
Conférence de Pékin
3. Utiliser la rédaction
d'un contre-rapport comme processus
d'apprentissage, de documentation
et d'évaluation des travaux
de groupes et des écarts
concernant les différentes
questions sur lesquelles travaillent
les groupes de femmes
4. Avoir recours au droit international
des droits humains pour promouvoir
les questions relatives aux
femmes et relatives aux préoccupations
populaires.
L'atelier comprenait les représentants
gouvernementaux du Ministère
indien de la femme et de l'enfant,
un juge à la retraite
connu pour avoir appliqué
le CEDAW dans une affaire célèbre,
ainsi que deux spécialistes
du CEDAW. La réunion
était basée sur
la discussion de chapitres préparés
par différents auteurs,
et a aboutit à des observations
visant à les améliorer.
Une fois que les chapitres furent
réécrits et présentés,
une équipe éditoriale
assura l'uniformité du
format de présentation.
Une équipe de onze membres
fut chargée de présenter
le contre-rapport au comité
du CEDAW. Ses membres comprenaient
des personnes souhaitant connaître
le comité et son fonctionnement.
Les mesures suivantes, entreprises
lorsque l'équipe fut
à New York, influèrent
directement sur l'examen du
rapport de l'Inde:
· Organisation des informations
contenues dans le double rapport
afin qu'elles correspondent
aux différents articles
du CEDAW
· Brève réunion
avec les membres du comité
du CEDAW
· Préparation
d'une note d'information d'une
page soulignant les aspects
importants des différents
chapitres du double rapport
· Préparation
de questions auxquelles le groupe
voulait que le gouvernement
indien réponde.
L'expérience des ONG
indiennes lors de l'examen du
CEDAW fut extrêmement
positive. Les membres du comité
mentionnèrent spécialement
le rôle que les ONG indiennes
avaient joué pour les
assister et soulevèrent
auprès de la délégation
du gouvernement toutes les questions
portées à leur
attention. Cette expérience
renforça le besoin d'un
partenariat avec des groupes
et systèmes au niveau
national et international pour
surveiller si un État
remplit effectivement ses obligations.5
|
La Commission de la
condition de la femme
Les travaux de la Commission
de la condition de la femme (CCF)
sont également utiles aux ONG chargées
dobserver la mise en uvre
des droits ESC. La CCF fut créée
en 1947 comme commission fonctionnelle
du Conseil économique et social.
Son mandat initial était de préparer
pour le Conseil des recommandations
et des rapports sur la promotion des
droits de la femme dans les secteurs
politique, économique, civil, social
et éducatif. Elle devait également
préparer des recommandations sur les
problèmes urgents relatifs aux droits
de la femme et exigeant une attention
immédiate. Son mandat sest
depuis considérablement élargi; en
1987, il comprenait la promotion de
légalité, du développement et
de la paix, ainsi que le suivi de
la mise en uvre de mesures pour
lavancement de la femme.
À lissue de la
Conférence de Pékin, lAssemblée
générale confia à la CCF la tâche
dintégrer dans ses travaux un
suivi des recommandations contenues
dans la vaste Plate-forme daction
adoptée à Pékin. Les points que la
CCF examina au cours de sa session
de mars 1999 comprenaient entre autres
la question de la relation entre les
femmes et la santé, ainsi que celle
des institutions nationales pour légalité
de genre.
Les ONG sont autorisées
à organiser des lobbies auprès de
la CCF des femmes lors de ses sessions
annuelles et cette dernière réserve
du temps dans son agenda pour se réunir
avec les ONG.
La CCF, qui démarra
avec quinze membres, en comprend aujourdhui
quarante-cinq, élus par lECOSOC
pour une période de cinq ans.
La Commission des
droits de lhomme des Nations
Unies
La Commission des droits
de lhomme des Nations Unies
est lorgane principal des Nations
Unies chargé de la protection et de
la promotion des droits humains.
Elle joua un rôle substantiel dans
la rédaction et ladoption des
normes internationales sur les droits
humains dans un certain nombre de
domaines.
Cette commission, qui
couvre également les droits ESC, accepte
les groupes de pression des ONG.
Composée de quarante-trois gouvernements
membres élus par lECOSOC, elle
lui est assujettie. Elle se réunit
normalement une fois par an à Genève.
Depuis 1992, elle organise également
des sessions spéciales pour répondre
à des cas durgence ou à des
crises exigeant une intervention immédiate.
Elle a établi un certain
nombre de procédures spéciales liées
à la réalisation des droits ESC.
Ces procédures sont de deux types:
Procédures
spécifiques aux pays, établies pour
examiner et effectuer le suivi de
la situation des droits humains dans
un pays ou sur un territoire spécifique,
ainsi que pour rédiger des rapports
sur cette situation
Procédures
thématiques, établies pour examiner
et effectuer le suivi de types spécifiques
de violations des droits humains,
ainsi que pour rédiger des rapports
sur ces violations.
Les procédures spéciales
font intervenir des groupes de travail,
des rapporteurs spéciaux, des représentants
ou experts. Elles constituent un
moyen plus flexible de réagir aux
violations des droits humains et aux
causes de ces violations que ceux
généralement permis par la commission.
Les personnes nommées dans des groupes
de travail ou nommées rapporteurs,
représentants ou experts, agissent
à titre individuel pour procéder aux
examens et aux suivis; elles adressent
à la commission des rapports publics
sur leurs mandats.
En juin 2000, la Commission
avait établi environ cinquante mécanismes
thématiques et relatifs aux pays.
En voici quelques-uns dont le champ
dapplication porte sur les droits
ESC:
-
Personnes
relogées
-
Les formes
contemporaines de racisme, de discrimination
raciale, de xénophobie et de lintolérance
qui y est associée
-
Les politiques
dajustement structurel et dette
extérieure
-
Les conséquences
néfastes des mouvements et déversements
illicites de produits et déchets
toxiques et nocifs pour la jouissance
des droits de lhomme
-
La promotion
et la protection du droit à la liberté
dopinion et dexpression
-
Les droits
de lhomme et lextrême
pauvreté
-
Le droit
au développement
-
Le droit
à léducation
-
Le logement
convenable
-
Le droit
à lalimentation
-
La question
de la violence contre les femmes,
y compris ses causes et ses conséquences
Certains mandats spéciaux
sont également confiés au Secrétaire
général ou à ses représentants spéciaux,
à léchelon de la Commission
des droits de lhomme et à celui
de la Sous-Commission de la promotion
et de la protection des droits de
lhomme. Ils incluent:
-
Les droits
de lhomme dans le contexte du
VIH/SIDA
-
Les droits
de lhomme et les exodes de masse
-
Le viol
et labus des femmes au cours
des conflits armés de lancienne
Yougoslavie.
La Sous-Commission de la promotion et de la
protection des droits de lhomme
La Sous-commission
de la promotion et de la protection
des droits de lhomme est le
principal organe subsidiaire de la
Commission des droits de lhomme;
elle traite aussi des droits ESC.
Appelée auparavant Sous-Commission
de la lutte contre les mesures discriminatoires
et de la protection des minorités,
elle changea de nom en 1999. Ses
principales fonctions sont:
1)
Entreprendre des études, en particulier à la
lumière de la Déclaration universelle
des droits de lhomme, et fournir
des recommandations à la commission
sur la prévention des discriminations
sous toutes ses formes et la protection
des minorités raciales, nationales,
religieuses et linguistiques.
2)
Exercer toute autre fonction que lui confie
lECOSOC ou la commission. Elle
se compose de vingt-six experts,
agissant à titre individuel, élus
par la commission avec le souci dune
répartition géographique équitable.
La moitié de ses membres et leurs
suppléants sont élus tous les deux
ans; chacun deux sert pendant
quatre ans.
Jusquà lan
2000, la Sous-commission tenait une
session annuelle de quatre semaines
à Genève. À partir de lan
2000, ses sessions furent réduites
à trois semaines. Outre ses membres
et leurs suppléants, y assistent les
observateurs des États, les organes
et les agences spécialisées des Nations
Unies, dautres organes intergouvernementaux,
ainsi que les ONG ayant statut consultatif
auprès de lECOSOC. À lheure
actuelle, elle comporte quatre groupes
de travail qui se réunissent entre
les sessions:
Le Groupe
de travail sur les communications
(qui se réunit pendant deux semaines
à lissue des sessions de la
Sous-commission pour examiner les
plaintes qui semblent révéler, sur
la foi de témoignages fiables, des
pratiques constantes de violations
graves des droits de lhomme
dans son cadre de référence, ainsi
que les réponses du gouvernement,
le cas échéant).
Le Groupe
de travail sur les Formes contemporaines
desclavage (qui se réunit plusieurs
semaines avant la session de la Sous-commission).
Le Groupe
de travail sur les populations autochtones
(qui se réunit juste avant la session
de la Sous-commission).
Le Groupe
de travail sur les minorités (qui
se réunit environ deux mois avant
la session de la Sous-commission).
La Sous-commission
a également nommé, pour la période
entre sessions, un Groupe de travail
sur les sociétés transnationales,
qui commence à créer des normes des
droits de lhomme destinées aux
entreprises.
Voici une liste de
certains sujets détude auxquels
se consacrent également les rapporteurs
spéciaux nommés par la Sous-commission:
limpunité
concernant les droits économiques,
sociaux et culturels
la dimension
des droits de lhomme dans les
transferts de populations
les droits
de lhomme et la répartition
des revenus
les pratiques
traditionnelles affectant la santé
des femmes et des fillettes
les viols
systématiques et lesclavage
sexuel et les pratiques analogues
à lesclavage en période de conflit
armé, y compris de conflit armé interne
les peuples
autochtones et leur relation à la
terre
les droits
des non-ressortissants
la mondialisation
et ses effets sur la pleine jouissance
des droits de lhomme.
LOrganisation
internationale du travail (OIT)
Etablie en 1919 par
le Traité de Versailles, lOrganisation
internationale du travail est lun
des organismes internationaux les
plus actifs vis-à-vis des droits ESC.
En mai 2000, elle avait adopté 182
conventions et 190 recommandations
sur les droits sociaux et économiques.
Sa structure et son mode de travail
sont fonction de lintervention
tripartite des syndicats, des organisations
demployeurs et des États parties.
Elle se compose de
la Conférence de lOIT, de lOrgane
directeur et de son secrétariat.
La Conférence de lOIT, qui se
réunit une fois par an, se compose
de deux représentants du gouvernement,
dun représentant des employeurs
et dun représentant des travailleurs
par État membre. LOrgane directeur,
qui est son pouvoir exécutif, se compose
de 56 membres, dont 14 représentent
les travailleurs et les 28 restants
représentent les États membres.
Les États membres ont
la tâche de présenter les conventions
et recommandations adoptées par lOIT
pour les faire examiner par le pouvoir
législatif de lÉtat. Ils communiquent
à lOIT la réponse du pouvoir
législatif. Ce procédé, particulier
à lOIT, permet aux syndicats
et autres groupes de faire du lobbying
pour la ratification dune nouvelle
convention ou lincorporation
dune recommandation dans la
politique de lÉtat.
Les États membres présentent
également des rapports sur les mesures
quils ont prises pour mettre
en uvre les conventions de lOIT.
Critère important, les gouvernements
adressent des exemplaires de leurs
rapports aux organismes nationaux
demployeurs et de travailleurs,
ce qui fournit à ces derniers loccasion
de commenter ces rapports. Ces commentaires
doivent être transmis par les
gouvernements à lOIT, en même
temps que les rapports. Lors des
conventions importantes, notamment
celles des droits humains, les gouvernements
présentent leurs rapports tous les
deux ans; pour dautres conventions,
ils les présentent tous les quatre
ans. Ces rapports sont examinés par
la Commission dexperts pour
lapplication des conventions
et recommandations. Cette Commission
fournit des « observations »
sur les situations quil estime
nêtre pas conformes aux obligations
du gouvernement aux termes de la convention
concernée; ces observations sont intégrées
au rapport annuel quil présente
à la Conférence internationale du
Travail. Il peut également adresser
des « demandes » aux gouvernements
afin de leur fournir loccasion
de rectifier les situations non-conformes
à leurs obligations aux termes de
la convention concernée, sans que
la question devienne publique.
Les observations sont adoptées pour les cas
plus graves et publiées dans le rapport
rédigé par la Commission dexperts.
Le rapport de la Commission
dexperts est présenté à lOrgane
directeur, qui peut alors inviter
les gouvernements à répondre lorsque
le Comité a établi que les dispositions
dune convention ne sont pas
respectées. Ce procédé fournit une
autre occasion aux syndicats et autres
groupes de soulever la question du
non-respect des conventions par leur
gouvernement.
Un autre procédé de
lOIT permet à lOrgane
directeur et à la Commission dexperts
dexaminer le statut des conventions
non-ratifiées par les États membres.
Ce procédé tend à se pencher davantage
sur les conventions relatives aux
droits humains fondamentaux.
Un procédé spécifique
de lOIT permet dexaminer
les allégations de violation de la
liberté dassociation. Ces allégations
sont présentées par les groupes de
travailleurs, les organisations demployeurs
ou les gouvernements. Elles font
lobjet denquêtes menées
par une Commission dinvestigation
et de conciliation au sein de lOIT.
Auteur: Lauteur de ce module est Mario Gomez.
NOTES
1. ONU Doc. UN E/1991/23, Annexe IV.
2.
Bruce Porter, « Socio-economic
Rights AdvocacyUsing International
Law: Notes from Canada, Economic
& Social Rights Review (juillet
1999) 2:5 (en ligne à www.web.net/cera).
3. Voir
également Nations Unies, Division
pour lavancement des femmes
(DAW), Promoting Womens Enjoyment
of their Economic and Social Rights.
Rapport dune réunion dun
groupe dexperts tenue à lUniversité
dAbo Akemi en Finlande, du 1
au 4 décembre 1997.
4. Comité pour
lélimination de la discrimination
à légard des femmes, Seizième
session, 13-31 janvier 1997, CEDAW/C/7/Rév.
3.
5.
« CEDAW and the Indian Womens
Groups » a été rédigé par
Madhu Mehra.
|