MODULE 12
LE DROIT À UNE NOURRITURE SUFFISANTE

Objet du module 12

Ce module a pour objet de donner une vue d’ensemble du droit à l’alimentation.

Le module

§         identifie les normes internationales relatives au droit à l’alimentation;
§         discute le droit à une nourriture suffisante;
§         analyse le lien entre le droit à l’alimentation et les autres droits;
§         examine les obligations des États en vertu du droit international et national, et
§         traite des mécanismes d’application et d’exécution.

Introduction

Vous avez faim? Si vous êtes né du bon côté de la planète et faites partie du bon groupe social, la solution à votre problème n’est pas plus loin que le plus proche ré­frigérateur.  Dans le cas contraire, vous aurez peut-être faim tout au long de votre courte vie, comme ces 800 millions de personnes nées du mauvais côté de la planète et ne faisant pas partie du bon milieu social.

Franchement, nombreux sont ceux qui sont las d’entendre parler de ces personnes et de leurs problèmes qui semblent éternels et inévitables.  Il n’en est pas ainsi.

Les raisons pour lesquelles les gens ont faim ne sont pas mystérieuses.  Les grandes famines ne sont pas le fait de Dieu.  La faim est créée et perpétrée par des décisions émanant des hommes. [1]

Contexte historique et politique

Le contexte historique et politique du droit à l’alimentation va bien au-delà de l’histoire et de la politique de la malnutrition.  Il s’agit du développement de la notion d’accès à l’alimentation en tant que droit.  À ce titre, il impose des obligations à l’État et à la communauté des États.  Ces obligations ont été créées comme ayant force « exécutoire », à travers des siècles de lutte sociale pour un État démocratique au service du peuple.  Dès l’aube de l’histoire, assurer l’accès à l’alimentation et au travail a toujours été considéré comme une obligation morale des dirigeants.  La seule différence (cependant décisive) entre ces obligations morales et le droit à l’alimentation est naturellement le fait que les droits humains accordent aux pauvres et aux groupes vulnérables une revendication qui, en principe, a un caractère exécutoire.  Traditionnellement, la population n’avait d’autre moyen que de se révolter contre le roi ou l’État qui avait manqué à ses obligations.  L’idée du droit fondamental à l’alimentation est d’établir une procédure et des moyens légaux permettant d’avoir des recours contre les autorités lorsqu’elles n’ assurent pas l’accès à l’alimentation.  Cette idée a presque 200 ans, et n’est pas encore appliquée légalement dans la plupart des États, même de nos jours.

En cas de pénurie, même le meilleur État du monde ne peut garantir que la population ne souffrira pas de la faim.  Les recherches menées sur les famines historiques des 100 dernières années ont toutefois montré que la plupart d’entre elles ne provenaient pas d’une pénurie alimentaire.  La raison était l’impossibilité  pour les victimes d’avoir accès à la nourriture en raison de la pauvreté ou (d’autres) troubles d’ordre politique.

Contexte actuel

Selon les estimations, plus de 840 millions de personnes à travers le monde souffrent chroniquement de la famine, en dépit d’une disponibilité alimentaire record par habitant, dans la plupart des pays et à l’échelon mondial.  Près de 40.000 enfants meurent chaque jour de malnutrition et de maladies connexes.  Les victimes sont les pauvres (aussi bien dans le Nord que dans le Sud).  Ils sont privés de  ressources tandis que les riches les monopolisent pour satisfaire leurs besoins de luxe.  Les populations (du Nord tout comme celles du Sud) sont déplacées de leurs terres, forêts, pâturages et zones de pêche.  Des milliards de personnes sont totalement exclues de la  vie économique de leurs pays respectifs et du monde et donc de la sécurité alimentaire.

L’impossibilité de se procurer des aliments peut avoir deux raisons: soit, il n’y a pas de nour­riture disponible soit, la nourriture est disponible mais les personnes qui en sont privées n’y ont pas accès.  Dans le passé, l’accent a spécialement été mis sur la disponibilité alimentaire totale.  Par conséquent, le respect du droit à l’alimentation a souvent été considéré comme principalement associé à la production alimentaire dans la lutte contre la pénurie.  Toutefois, cette idée maîtresse n’est correcte que dans la mesure où elle englobe la production d’aliments par les pauvres pour leurs propres besoins.  Bien souvent, ces derniers n’ont pas accès à la nourriture en raison de leur base de ressources marginale.  Le rendement par hec­tare des champs du riche et la disponibilité alimentaire totale sont sans intérêt pour eux, s’ils sont trop pauvres pour acheter cet excédent.  Une autre question est de savoir si la nourriture disponible est suffisante en ce qui concerne un certain nombre de variables, telles que la qua­lité nutritionnelle, la quantité et l’acceptabilité culturelle.

Il ne fait aucun doute, pour les experts, qu’une nourriture suffisante est disponible (ou pour­rait être produite avec les ressources actuelles) non seulement à l’échelon mondial mais éga­lement dans presque tous les pays, même ceux dans lesquels la malnutrition sévit.  Beaucoup de soi-disant pays pauvres produisent des denrées alimentaires en quantité plus que suffisante non seulement pour le marché local mais également pour l’exportation, alors que la faim et la malnutrition persistent dans le pays.  Dans une économie de marché, ceux qui sont trop pau­vres pour formuler une demande effective n’auront pas de nourriture (à moins de produire leurs propres denrées alimentaires ou de bénéficier de transferts de nourriture).  Aujourd’hui, la faim et la malnutrition ne sont pas associées à la disponibilité alimentaire mais sont plutôt une question de droits.

Famines, entraves à la jouissance des droits fondamentaux

" Les famines du point de vue des droits fondamentaux sont considérées comme des catastrophes économiques et non simplement des crises alimentaires. Les études empiriques ont dégagé plusieurs façons différentes dont les famines peuvent se produire-défiant ainsi l'uniformité stéréotypée de la réduction de la disponibilité alimentaire . . . Il est intéressant de noter que les famines peuvent subvenir en l'absence de réduction substantielle de la disponibilité alimentaire en raison notamment de l'importance de l'approche axée sur la disponibilité alimentaire dans l'analyse courante de la famine. Du point de vue des droits fondamentaux, l'accent est plutôt mis sur la capacité des différentes couches de la population dans la gestion de leur alimentation, en tenant compte de la manière dont les droits sont respectés dans cette société et qui dépend des caractéristiques juridiques, économiques, politiques et sociales . . .

Quatre observations générales sur les famines envisagées dans l'optique de la jouissance des droits fondamentaux: premièrement, cette approche offre un cadre général d'analyse des famines plutôt qu'une hypothèse particulière sur leur causalité. Deuxièmement, il est intéressant de noter que les famines peuvent subvenir dans un contexte de haute conjoncture (comme au Bengale en 1943) tout comme dans des conditions de marasme économique (comme en Ethiopie en 1974). Troisièmement, il est important de faire la distinction entre la réduction de la disponibilité alimentaire et la réduction de la jouissance directe. La notion de réduction de la disponibilité alimentaire s'intéresse à la quantité de nourriture existant dans l'économie en question alors que la réduction de la jouissance directe porte sur la production alimentaire de chaque agriculteur et la quantité de nourriture ainsi produite qu'il peut directement consommer. En dernière analyse, la mise en exergue de l'idée de jouissance a pour effet de mettre l'accent sur les droits juridiques. D'autres forces pertinentes, telles que les forces du marché, peuvent être considérées comme opérant dans un système de relations juridiques (droits de propriété, obligations contractuelles, échanges légaux, etc.). La loi sépare la disponibilité alimentaire du droit à la nourriture. Les morts provoquées par la famine peuvent d'autant plus refléter la légalité ".2

L’accès à l’alimentation légalement garanti aux pauvres—voix critiques

Certaines personnes soutiennent que l’obligation qu’ont les États de faciliter l’accès à la nourriture n’existe qu’à l’égard des « pauvres méritants », ceux qui n’ont pas accès aux aliments pour des raisons indépendantes de leur volonté.  La tendance est de rendre les pauvres et les groupes vulnérables responsables de leur condition.

La peur qu’un État qui nourrit une partie de sa population ne soit finalement acculé à la ruine économique n’a pas grand-chose à voir avec le droit fondamental à l’alimentation.  Le fait qu’il y ait une garantie légale pour certains produits en cas de besoin élémentaire, ne signifie pas que les gens se retrouvent délibérément dans le besoin et que ces biens sont alors obtenus en invoquant cette garantie (avec pour résultat un État nourrissant son peuple).  Il existe plu­sieurs raisons qui empêcheraient les gens d’utiliser cette garantie, la plus simple étant qu’ils préfèrent ne pas être dans le dénuement.  L’expérience a montré que les personnes qui ont véritablement le choix (lorsqu’on leur facilite l’accès aux ressources, aux technologies et à l’emploi avec dignité) préfèrent utiliser ces opportunités pour se nourrir.

Une autre critique est faite du droit fondamental à l’alimentation (et des droits économiques et sociaux similaires).  L’argument avancé est qu’un État suffisamment fort pour garantir lé­galement l’accès à la nourriture mettrait nécessairement en jeu les droits civils et politiques.  Cette critique s’applique en général à l’expérience en Union soviétique et dans d’autres pays socialistes.  Toutefois, cela est  inexact pour deux raisons.  L’Union soviétique n’a pas donné de garantie légale des droits économiques et sociaux, tout comme les États qui donnent effet aux droits économiques et sociaux fondamentaux ne doivent pas le faire au détriment des droits civils et politiques.  Bien au contraire: les droits politiques et civils ne peuvent être renforcés sans distinction que sur la seule base des droits économiques et sociaux et vice versa.  C’est l’un des aspects de l’indivisibilité des droits humains—qui a été perti­nemment souligné par la commu­nauté internationale.

Le droit à l’alimentation en tant que droit humain

Compte tenu de l’importance cruciale de l’accès à la nourriture dans un monde d’abondance où de grandes famines persistent, il n’est peut-être pas surprenant que le droit à l’alimentation joue un rôle de pionnier dans la renaissance des droits économiques et sociaux au cours des quinze dernières années.  Le droit à l’alimentation a été le premier des droits ESC étudiés par les institutions de l’ONU s’occupant des droits humains.

En 1987, un rapport intitulé Le droit à une alimentation suffisante en tant que droit de l’homme a été le point de départ d’une série d’enquêtes sur les droits énoncés dans le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.  Le rôle crucial du droit à l’alimentation a été reconfirmé quelque dix années plus tard lorsqu’en 1996 le Sommet mondial de l’alimentation a demandé au Haut Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme d’en définir l’aspect juridique.  Une autre conséquence du Sommet mondial de l’alimentation a été le « Projet de Code de conduite sur le droit à une nourriture adéquate » Ce document est le ré­sultat d’une action menée par le FIAN (l’organisation internationale des droits humains qui s’intéresse particulièrement au droit de se nourrir), la WANAHR (l’Alliance mondiale pour l’alimentation et la nutrition) et l’Institut Jacques Maritain.  L’on estime que l’article 4 du Projet de code fournit la définition actuelle du droit à l’alimentation.  Il stipule que:

Le droit à une nourriture adéquate signifie que chaque homme, chaque femme et en­fant, seul ou en tant que communauté, doit pouvoir bénéficier en tout temps d’un ac­cès physique et économique à une nourriture suffisante, ou utiliser les ressources ap­propriées afin d’en bénéficier d’une façon qui soit compatible avec la dignité hu­maine. Le droit à une nourriture suffisante fait partie du droit à un niveau de vie suff­isant.

Le droit à l’alimentation est consacré dans plusieurs traités internationaux sur les droits hu­mains et dans d’autres textes.  Il s’agit:

1.   Du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels   

      Dans l’article 11(1), il est clairement stipulé que le « toute personne à un niveau de vie suffisant pour elle-même et sa famille, y compris une nourriture, un vêtement et un logement suffisants».  En outre, au paragraphe 2 du même article, le « droit fondamental qu’a toute personne d’être à l’abri de la faim » est reconnu.

2.   De la Convention relative aux droits de l’enfant

Dans l’article 24(2)(c), les États parties sont tenus de « lutter contre la maladie et la mal­nutrition, y compris dans le cadre de soins de santé primaires, grâce notamment à l’utili­sation detechniques aisément disponibles et à la fourniture d’aliments nutritifs et d’eau potable, compte tenu des dangers et des risques de pollution du milieu naturel ».

3.   Du Protocole additionnel aux conventions de Genève et relatif à la Protection des victi­mes des conflits armés internationaux et non-internationaux.

Le Protocole additionnel aux conventions de Genève et relatif à la Protection des victi­mes des conflits armés internationaux et non-internationaux stipule dans on article 54(1) qu’il est interdit d’affamer la population civile à des fins stratégiques.  Dans article 54(2) il est interdit d’attaquer, de détruire, de retirer ou de rendre inutilisables les objets indis­pensables à la survie de la population civile, tels que les denrées alimentaires, les systè­mes d’approvisionnement en eau potable et les travaux d’irrigation, dans le but spécifique de priver la population civile ou la partie adverse de moyens de subsistance, quel qu’en soit le motif, que ce soit pour affamer les civils, les amener à se déplacer ou toute autre raison.

Eléments du droit à l’alimentation—le droit à une alimentation suffisante

L’accès à une alimentation suffisante est fondamental pour le droit à une nourriture suffisante.  La nourriture disponible doit être suffisante sur le plan de la qualité et de la quantité.  L’accès à une alimentation adéquate a été défini en termes de rations caloriques, protéiques et de nutriments.  La faim et la malnutrition sont les conséquences de l’inaccessibilité à une alimentation suffisante.  Les effets de la privation de nourriture peuvent être diagnostiqués avec une grande précision médicale.  La malnutrition n’est pas toujours la sous-alimentation (faible quantité de ration alimentaire) mais pourrait également provenir de la qualité médiocre des aliments.  Les deux sont souvent le résultat de la pauvreté et de la discrimination, en particu-lier celle fondée sur le sexe.

La faim pousse l'homme à monter au plafond
Et à se retenir aux chevrons.
Elle pousse l'homme à s'étendre
Mais sans trouver de repos.
Elle pousse l'homme à s'étendre
Sans pouvoir se lever.
Elle pousse l'homme à s'étendre
Et à compter les chevrons…

-Tradition orale du Nigéria.3

 

Des indicateurs précis de ration alimentaire et de malnutrition sont moins importants pour la description du droit à l’alimentation qu’on pourrait le croire.  L’on peut normalement déceler qu’un pays a failli à ses obligations sans compter la ration calorique ou faire subir un examen médical à la victime.

Une nourriture suffisante peut également se rapporter à des conditions socio-économiques et culturelles.  Tout comme un niveau de vie suffisant, une alimentation suffisante revêt  un sens différent dans des contextes culturels différents.  Il existe cependant un critère minimum universel en toutes circonstances (culturelles et autres).  Ce minimum a même été défini dans l’article 11(2) du PIDESC comme le droit fondamental d’être à l’abri de la faim.

Il existe des définitions de la faim et de la malnutrition en fonction de la ration de nutriments.  Il est possible de fixer, pour les groupes démunis, des besoins alimentaires minimum et un revenu minimum nécessaires pour prévenir la faim et la malnutrition ainsi que les privations d’autres besoins élémentaires, ce qui a souvent été appelé le « seuil de pauvreté absolue » ou le « seuil de besoins élémentaires » alors que le revenu nécessaire pour jouir d’un niveau de vie suffisant selon l’article 11(1) est appelé « seuil de pauvreté relative ».

L’absence de pauvreté absolue peut être considérée comme la norme minimum en matière de droit à un niveau de vie suffisant.  En termes de revenus, le seuil de pauvreté relative est normalement défini comme le pourcentage de la moyenne du revenu par habitant d’un pays.  La plupart des théoriciens des sciences sociales conviendraient que tout chiffre en deçà de 40 pour cent du revenu par habitant est en général perçu comme le reflet d’un état de dénuement relatif.  Par conséquent la barre des 40 pour cent serait appelée le « seuil de pauvreté relative » ou le « seuil d’adéquation ».

Droit à l’alimentation et interdépendance des droits

Le droit à une nourriture suffisante constitue un exemple de l’interdépendance des droits humains.  Plusieurs aspects de ce droit démontrent qu’il est étroitement lié à d’autres droits humains.  Le droit fondamental à l’alimentation s’inscrit dans le droit à un niveau de vie suffisant.  Un niveau de vie suffisant est soit le résultat d’un transfert soit considéré comme quelque chose d’acquis en contrepartie d’activités économiques telles le travail salarié, le travail indépendant, la prestation de services et la fourniture de produits ou de moyens de production.  L’on gagne sa vie soit en travaillant soit par des transferts et bien souvent les deux.  Le droit à un niveau de vie suffisant peut donc être réalisé par le biais de transferts d’aide sociale, en vertu du droit de gagner sa vie ou du droit à la sécurité sociale.

§         Le droit au travail (Voir le module 10)

Pour la plupart des groupes vulnérables, le droit à l’alimentation ne se pose pas tant en termes de droit à des prestations sociales, étant donné que ces systèmes ne sont pas encore répandus.  Dans ces conditions, traiter du droit à l’alimentation signifie d’abord qu’il faut examiner le droit de la famille et de la communauté de se nourrir.  Cela suppose que les familles ou  la communauté ont accès à des ressources productives et peuvent obtenir du travail.  La plupart des personnes jouissent de leur droit à l’alimentation par la réalisation de leur droit au travail.

§         Le droit à la sécurité sociale (Voir le module 11)

Le droit à l'alimentation et les droits des travailleurs
Etude de cas dans l'État de Georgie, aux États-Unis

En 1997-98, dans le cadre de sa campagne intitulée " Les droits sociaux sont des droits humains ", la Georgia Citizens' Coalition on Hunger (Coalition des citoyens de Georgie contre la faim) a lancé une " Campagne d'institution d'un salaire de subsistance " afin d'augmenter le salaire minimum horaire dans l'État qui ne respectait pas le niveau du salaire minimum fédéral fixé à 5,15 dollars de l'heure. En Georgie, les employeurs qui ne bénéficient pas de fonds fédéraux sont autorisés à payer leurs employés 3,25 dollars de l'heure. Etant donné que l'État de Georgie a la réputation d'être contre les syndicats, plusieurs sociétés américaines s'y installent pour profiter de la main-d'œuvre mal payée. En outre, la main-d'œuvre qui perçoit des salaires inférieurs au minimum fixé est constituée " d'exilés d'assistance sociale "-des gens qui ont été exclus du système d'aide sociale après seulement quatre ans, ce qui ne correspond pas à la norme fédérale qui est de cinq ans-et de la main-d'œuvre carcérale. Beaucoup de sociétés retirent aux travailleurs syndiqués les quelques emplois qui restent dans l'industrie manufacturière et la prestation de services pour les donner à la main-d'œuvre carcérale et aux bénéficiaires de l'aide sociale, afin de réduire les coûts de production. La Hunger Coalition a commandé une étude sur cette question et a découvert que la majorité des Georgiens était en faveur d'une augmentation du salaire minimum. Elle a par ailleurs travaillé avec les chercheurs des universités locales afin de déterminer que le niveau minimum de salaire nécessaire pour sortir une famille de quatre personnes de la pauvreté (comme défini aux États-Unis) est de 10 dollars de l'heure, le double du salaire minimum fédéral actuel.

Le droit à la sécurité sociale considéré dans un sens restreint inclut la garantie de l’accès à l’alimentation à ceux qui ne peuvent participer à la vie économique, où ils auraient pu gagner leur vie.  La sécurité sociale ne doit néanmoins pas être identifiée à des mesures de l’État providence.  Il s’agit d’un concept universel qui s’étend bien au-delà de l’assurance sociale, qui est un moyen de réaliser le droit à la sécurité sociale.  Dans plu­sieurs sociétés, la sécurité sociale est assurée par la famille élargie ou d’autres systèmes.  Ainsi la Déclaration universelle des droits de l’homme en son article 25 considère que le droit à la sécurité (sociale) permet de lutter contre le manque de moyens d’existence dans des conditions spécifiques comme décrit ci-dessus, et il est lié au droit à un niveau de vie suffisant qui introduit le même article.  Nous pouvons donc dire que le droit à la sécurité sociale donne effet au droit à un niveau de vie suffisant lorsque les gens ne peuvent pas gagner leur vie.

Le droit à un niveau de vie suffisant complète la notion traditionnelle de sécurité sociale qui rend ces services dépendants de « circonstances indépendantes de sa volonté ».  Pour bénéficier des prestations sociales traditionnelles, il faut souvent remplir des conditions spécifiques.  Toutefois, le droit à un niveau de vie suffisant introduit des mesures publiques (comme l’aide sociale) qui sont disponibles sur le seul critère des revenus de l’individu, insuffisants pour assurer un niveau de vie décent, et en particulier accéder à la nourriture.

§         Le droit à la santé (Voir le module 14)

Le droit à l’alimentation est étroitement lié au droit à la santé.  Ce lien est évident pour la question de la sous-alimentation qui est la cause fondamentale d’un très grand nombre de décès liés aux problèmes de santé dans l’hémisphère sud.  Les études menées dans l’hémisphère nord révèlent que le régime alimentaire des pauvres est moins sain que celui des riches.  En outre, les effets des techniques de production agricole préconisées par les industries agro-alimentaires menacent la santé de tous, riches et pauvres.  L’accès à une nourriture vraiment satisfaisante sur le plan de la santé est devenu un problème dans beaucoup des populations des pays du Nord.

Les risques de santé tout comme le manque de durabilité des pratiques agricoles actuelles jette un nouvel éclairage sur l’article 11(2) du PIDESC portant sur la réforme des systèmes agraires.  Cela est également vrai pour le droit au travail dans l’agriculture ou en zone rurale en général.

Le droit des femmes à l’alimentation (Voir le module 4)

La nourriture concerne principalement les femmes.  Dans la plupart des familles, ce sont les femmes qui préparent les repas et travaillent aux champs.  Dans le même temps, elles mangent souvent en dernier et seulement les restes.  Les femmes possèdent environ 1 pour cent des terres agricoles dans le monde bien qu’elles travaillent sur peut-être plus de 50 pour cent des terres.

Le salaire minimum des femmes est en général inférieur à celui des hommes, pour le même travail.  Ainsi, un emploi qui peut nourrir un homme pourrait ne pas nourrir une femme.  La position économique plus précaire des femmes les rend souvent plus vulnérables à la faim et à la malnutrition.  Les tensions supplémentaires de la grossesse et de l’éducation des enfants mettent davantage en danger la sécurité alimentaire des femmes.

Les lois de succession qui excluent la femme ou la fille mettent ces dernières dans une position de faiblesse, menaçant ainsi leur sécurité alimentaire à la mort du mari ou du père.  Dans bon nombre de pays, les structures familiales mettent la sécurité alimentaire des femmes dans les mains du mari, du frère ou d’autres hommes.  Ces situations nécessitent une attention particulière de la part de chaque État et de la communauté des États.  Il faut les examiner et y remédier par l’éducation et la législation.

Plusieurs mesures relatives aux politiques de sécurité économique ou les programmes d’emploi eux-mêmes négligent les femmes et leurs besoins alimentaires.  Les femmes sont toujours l’objet d’une discrimination dans l’exécution de nombre d’obligations des États énoncées au chapitre suivant.  Les droits des femmes sont, dans de nombreux cas, étroitement liés à leur droit à l’alimentation.

Le droit de la communauté de se nourrir

La nourriture ne peut pas être dissociée de son mode de production, de son mode d’acquisition ni de son mode de consommation.  Ce sont là des aspects fondamentaux de la culture et des valeurs d’une communauté ainsi que de son identité.  Une nourriture suffisante c’est bien plus qu’une ration de calories ou d’éléments nutritifs et beaucoup plus qu’un simple produit de base.  Une alimentation suffisante relève de la culture.  Les droits culturels et ceux des minorités concernant la nourriture doivent être respectés, protégés et réalisés.  Pour ce faire, la communauté doit, dans la plupart des cas, parvenir à se nourrir.  C’est évident pour les autochtones.  Toutefois, un indicateur général de sociétés offrant une très bonne qualité de vie est qu’elles valorisent la nourriture en tant qu’élément de leur culture et  parviennent à se nourrir.  (Voir le module 17 pour plus d’informations sur les droits culturels.)

Dans la plupart des cas de famine et de malnutrition graves, la population n’a pas la possibilité d’obtenir de la nourriture du fait que la communauté n’a pas accès aux produits alimentaires.  Le droit de se nourrir affecte fréquemment et principalement la communauté plutôt que l’individu.  Dans une communauté ainsi affectée, il peut y avoir des femmes et des fillettes qui souffrent davantage de privation de nourriture.  Dans bien des cas, il s’avère donc nécessaire de considérer le droit à l’alimentation et en particulier le droit de pouvoir se nourrir comme un droit des collectivités (provenant, naturellement, du droit de l’individu à l’alimentation) plutôt qu’un droit des individus principalement.

Réforme agraire

Pour un grand nombre de pays, peu d’experts sérieux estiment qu’ils seront en mesure de garantir le droit de se nourrir aux masses rurales dans un avenir proche, sans réforme agraire.  Se soustraire aux mesures de réforme agraire dans ces conditions constitue une violation du droit de se nourrir.  Cette fuite peut prendre différentes formes.  Naturellement, la forme la plus crue est tout simplement l’absence de réforme agraire ou de programmes de réforme agraire.  Pourtant, la plus courante est l’inefficacité des programmes ou lois agraires avec des échappatoires qui empêchent la distribution des terres aux paysans qui en sont privés.  La réforme agraire qui répond à l’obligation de faciliter l’accès à une alimentation suffisante nécessite plus que la simple distribution de ressources productives (terres, eau, technologie, etc.).

Les obligations des États

Les obligations suivantes des États ont été clarifiées, ces dernières années, dans le cadre du Pacte.

Le droit à l’alimentation impose aux États les obligations génériques de respecter, de protéger et de satisfaire l’accès de toute personne à la nourriture.  Une violation de ces obligations a pour effet de priver l’individu de tout accès à la nourriture ou de le maintenir dans un État de privation alimentaire.

Les « obligations de respecter » qu’a l’État lui impose de s’abstenir de priver quiconque de l’accès à l’alimentation.  Ces obligations sont inconditionnelles en ce sens que l’on peut toujours s’attendre à ce qu’un État s’abstienne de priver la population de l’accès à la nourriture.  Etant donné que même l’État le plus pauvre peut le faire, cette obligation est impérative.

Les « obligations de protéger » le droit à l’alimentation qu’a l’État lui impose de veiller à ce que l’accès de toute personne à la nourriture ne soit pas compromis par des actes de destruction perpétrés par des tiers notamment ses voisins, ses employeurs ou des entreprises.  Si l’obligation de respecter le droit à l’alimentation est tout à fait simple, celle de protéger ce droit peut devenir assez compliquée.  Quel type de protection peut-on raisonnablement attendre d’un État?

Les « obligations de satisfaire » ce droit qui incombent à l’État, lui imposent d’assurer aux personnes dans le besoin l’accès aux denrées alimentaires.  Cela signifie, en particulier, que l’État est tenu de fournir de la nourriture à toute personne menacée de faim ou de malnutrition.  Mais cela ne signifie nullement que l’État a une obligation générale de fournir de la nourriture.  Pour satisfaire ce droit, il faut veiller à ce que la population soit à l’abri des privations.

Les obligations de protéger ce droit et de permettre l’accès à une nourriture suffisante, doivent être interprétées sous l’optique de la clause conditionnelle concernant l’utilisation « au maximum des ressources disponibles », étant donné que cela peut laisser entendre qu’il s’agit des infrastructures et des ressources publiques.  Dans presque tous les pays et au niveau de la communauté internationale,  en général, la nourriture ou les ressources nécessaires sont suffisantes pour assurer à tous l’accès à l’alimentation.  La pénurie de nourriture est plutôt un problème de pauvreté et d’inaccessibilité aux ressources productives et à l’emploi.

Principes de non-discrimination et de durabilité

Le principe de non-discrimination est particulièrement important pour le droit à l’alimentation.  Les obligations des États citées doivent être remplies et appliquées sans discrimination fondée par exemple sur le sexe ou la génération.  La non-discrimination fondée sur la génération doit inclure les enfants, les personnes âgées et les générations futures.  Pour ce qui concerne les enfants et les générations futures, le principe de non-discrimination nécessite la durabilité de l’accès à l’alimentation, ce qui inclut les préoccupations au sujet de la future production alimentaire, étant donné que les méthodes de production agricole actuelles ne sont pas durables.  La notion de durabilité relative aux droits humains impose à la communauté des États l’obligation d’examiner ces questions en ce moment précis.  Il importe, dans le cadre de la cause des droits humains, de mettre un terme aux pratiques agricoles actuelles et autres activités économiques qui mettent en jeu les ressources alimentaires des futures générations.

Reconnaissance juridique nationale

Le droit à l’alimentation est en général reconnu comme faisant partie du droit à un niveau de vie suffisant.  Ceci est implicite (et souvent explicite) dans les dispositions relatives à la sécurité sociale, au revenu minimum, à la réforme agraire ou à la législation sur le salaire minimum, qui ont tendance à s’appliquer aux besoins élémentaires y compris l’alimentation.

La loi constitutionnelle de la plupart des pays démocratiques reconnaît que l’État doit donner une garantie pour assurer des conditions de vie décentes à tous.  Lorsqu’il s’agit du rôle du droit à un niveau de vie suffisant et du droit à l’alimentation dans la jurisprudence nationale, le tableau change quelque peu.  Il est vrai que pour certains éléments du droit à l’alimentation, il existe de nombreux précédents ayant fait jurisprudence.  Mais dès qu’il s’agit de garantir légalement l’accès des pauvres à la nourriture, la situation est moins convaincante.  Dans de nombreux pays, certaines dispositions des textes relatifs à la sécurité sociale prévoient un paiement forfaitaire qui devrait permettre à tous d’avoir accès à une nourriture suffisante, ce qui n’offre cependant pas, au plan légal, la garantie  d’être à l’abri de la faim.

Mécanismes d’application et de mise en œuvre

L’application (ou la mise en oeuvre) du droit à l’alimentation n’implique pas qu’il faille promouvoir l’idée que la population se procure des aliments d’une manière ou d’une autre.  Cela signifie beaucoup plus.  Précisément que l’État mette en place des mécanismes lui permettant de remplir ses obligations (si besoin est par l’utilisation du pouvoir qu’il a d’imposer des sanctions).  Il va sans dire que l’application de ce droit sera le fait non pas d’un État bienfaiteur mais le résultat d’une lutte menée par la population et les mouvements politiques.  L’importance de l’utilisation politique, par tous, du droit à l’alimentation ne saurait être surestimée.  La mention simple et généralisée de ce simple droit fondamental sera le meilleur moyen de le promouvoir.  Toutefois, cela ne change rien à la vérité formelle selon laquelle il incombe en définitive, à l’État ou à la communauté des États, de faire fonctionner ces mécanismes.

Les mécanismes d’application et d’exécution relatifs au droit à l’alimentation ne sont pas des mécanismes qui respectent, protègent et assurent uniquement l’accès de la population à l’alimentation.  À titre d’exemple, il ne s’agit pas tout simplement d’avoir n’importe quels politique alimentaire, réforme agraire,  plans de garantie de l’emploi, lois sur le salaire minimum, programmes d’aide sociale et lois sociales, système de protection du consommateur, codes pénaux, etc.  Ces initiatives peuvent faciliter la jouissance du droit à l’alimentation et s’inscrivent en droite ligne dans les obligations des États.  Ce qui est fondamental, c’est la notion de recours garanti.  Les droits humains sont légaux par nature, même s’ils ne sont pas appliqués dans le droit positif.

Action des populations pour la restauration de l'accès à la nourriture:
Le cas des paysans philippins

En 1991-92, certaines régions des Philippines furent touchées par une forte sécheresse qui dura plusieurs mois. Les paysans de Seltan Kudarat avaient consommé toutes leurs réserves de nourriture en raison de la sécheresse. Ils demandèrent l'aide de l'organe gouvernemental chargé des approvisionnements d'urgence dans la région. Ils rencontrèrent à plusieurs reprises des officiels qui leur annoncèrent que les paysans recevraient du riz paddy sur la base d'un prêt remboursable après la prochaine récolte. Mais ces promesses ne furent pas tenues. Les paysans apprirent également que du riz paddy avait été transporté des entrepôts à d'autres lieux et soupçonnèrent que des transactions malhonnêtes se tramaient dans leur dos. En attendant, la communauté avait enregistré des décès d'enfants et de personnes âgées provoqués par la famine. Refusant de tolérer l'apathie de l'organisme gouvernemental, environ 1500 paysans se réunirent devant l'entrepôt, prirent le paddy et le distribuèrent comme il se devait. Le riz fut donné aux membres de la communauté sur la base d'un prêt comme précédemment convenu avec les officiels.

Le lendemain, le gouvernement arrêta 21 dirigeants de paysans sous l'inculpation de vol. Une bonne partie du riz paddy fut également repris à la communauté. Le FIAN, l'organisation internationale des droits humains militant pour le droit de se nourrir, lança alors une campagne au nom des paysans souffrant de la faim et de leurs dirigeants incarcérés. Le FIAN s'insurgea contre l'inculpation pour vol en invoquant le droit à la nourriture et l'obligation de l'État qui en découlait. L'un des paysans écrivit au FIAN: " Je n'aurais jamais cru que des paysans comme nous pouvaient se faire entendre au niveau national et international. Tant de personnes s'intéressent à notre situation et reconnaissent que nous aussi sommes des êtres humains avec une dignité et des droits ".

Au bout d'une année, le gouvernement interrompit les poursuites contre les dirigeants des paysans. Le Ministre de la Justice reconnut que les paysans n'étaient pas coupables de vol. Il fit référence aux circonstances ayant abouti à l'action des paysans et utilisa le cadre des droits ESC pour développer ses arguments sur l'action des paysans.4

En matière de procédure internationale, le droit international prévoit que les États établissent des rapports conformément aux traités pertinents.  Cette procédure a une portée limitée, mais ces dernières années, le cadre été élargi par le CDESC qui examine les rapports des États.  La promotion des droits ESC serait renforcée si des plaintes individuelles pouvaient être formulées auprès de l’ONU par les victimes présumées des violations de ces droits.  Aux termes des dispositions de la Charte sociale européenne (qui ne contient pas de mention explicite du droit à l’alimentation, mais fait seulement référence au droit d’être à l’abri de la pauvreté), une procédure similaire de plainte collective est entrée en vigueur il y a un an.

Obligations internationales

Selon  l’article 2(1) du PIDESC, les États parties s’engagent à prendre des mesures « séparément et dans le cadre de l’aide internationale et de la coopération ».  Nous devons donc examiner les obligations internationales visant les bénéficiaires vivant en dehors du territoire du pays en question.  Ces obligations internationales sont particulièrement importantes pour le droit à l’alimentation.

S’agissant des obligations de respect et de protection, les États sont tenus de prévenir tout acte susceptible d’entraver l’accès à l’alimentation dans les autres pays.  Le fait que les victimes vivent dans un pays étranger B qui a l’obligation de respecter et de protéger le droit à l’alimentation ne soustrait pas l’État A au devoir d’agir de manière décisive pour protéger l’accès à la nourriture dans les autres pays.  Voici deux situations-type:

Si une société transnationale ayant son siège dans un pays A détruit l’accès à l’alimentation dans un pays B (par des expulsions forcées, par exemple), cela devrait aboutir à une action en justice conformément au système juridique de l’État A même si l’État B n’intervient pas.

Si une entreprise dans un pays A pratique le dumping dans le commerce international contre un groupe vulnérable d’un pays B et que par conséquent ce groupe est privé de tout accès à la nourriture, ce crime contre le droit à l’alimentation doit être considéré comme punissable dans le pays A même si le pays B n’intervient pas.

L’absence de ressources et le contrôle limité du commerce et de la finance à l’échelle internationale ont des répercussions sur la capacité des États-nations à remplir l’obligation de faciliter l’accès à une nourriture suffisante.  Cela montre, en particulier, la nécessité de renforcer les politiques sociales nationales avec des politiques sociales mondiales.  Les programmes d’emploi ainsi que les transferts de nourriture ou de liquidités figurent parmi les programmes nécessaires pour assurer l’accès aux produits alimentaires.  Pour certains pays,

Déclarations et résolutions relatives au droit à l’alimentation

1.       La Déclaration universelle des droits de l’homme (1948)

La DUDH stipule au paragraphe 25 que: « Toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour l’alimentation . . . »

2.       La Déclaration universelle pour l’élimination définitive de la faim et la malnutrition (1974)

La Déclaration universelle proclame que « Chaque homme, femme et enfant a le droit inaliénable d’être libéré de la faim et de la malnutrition afin de se développer pleinement et de conserver ses facultés physiques et mentales ».

 

3.       La Déclaration de Rome sur la sécurité alimentaire dans le monde (1996)

La Déclaration de Rome affirme en son article 1: « Nous, Chefs d’Etat et de gouvernement, ou nos représentants, réunis pour le Sommet mondial de l’alimentation à l’invitation de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture, réaffirmons le droit de chaque être humain d’avoir accès à une nourriture saine et nutritive conformément au droit à une nourriture adéquate et au droit fondamental de chacun d’être à l’abri de la faim ».

 

4.       Le Plan d’action du Sommet mondial de l’alimentation (1996)

Le Plan d’action s’est fixé comme objectif 7.4 « Clarifier le contenu du droit à une nourriture adéquate et le droit fondamental de chacun d’être à l’abri de la faim, tel qu’il figure dans le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (le Pacte) et autres instruments internationaux et régionaux pertinents, et accorder une attention particulière à l’exécution et à la réalisation pleine et progressive de ce droit comme moyen de parvenir à la sécurité alimentaire pour tous ».

5.       La Déclaration des droits de l’enfant (1959)

Les principes 4 et 8 de la Déclaration du droit de l’enfant affirme que « L’enfant a droit à une alimentation, à un logement, à des loisirs et à des soins médicaux adéquats . . .  L’enfant doit, en toutes circonstances, être parmi les premiers à recevoir protection et secours ».

6.       La Déclaration sur la protection de la femme et des enfants en cas d’urgence et dans les conflits armés (1974)

La Déclaration stipule que les femmes et les enfants se trouvant au mileu d’un conflit armé dans la lutte pour la paix ou qui vivent dans des territoires occupés ne doivent pas être privés d’abri, de nourriture, d’assistance médicale ou d’autres droits inaliénables.

7. La Conférence mondiale sur l'emploi (1976)
Le paragraphe 2 de la Conférence mondiale sur l'emploi indique que " les besoins élémentaires, comme l'interprète ce Programme d'action incluent deux éléments. Premièrement ils incluent certains besoins minimums d'une famille pour la consommation privée: nourriture suffisante…Deuxièmement, ils incluent . . . l'eau potable ".

8. Le Programme alimentaire mondial (1977)
Dans la quatrième déclaration du Programme alimentaire mondial, l'alimentation contribue au développement économique et social notamment pour les groupes les plus vulnérables et nécessiteux. Un accent particulier est mis sur les projets exécutés dans les pays les plus nécessiteux. L'on note également les besoins alimentaires pressants et la promotion de la sécurité alimentaire dans le monde en conformité avec l'ONU et la FAO.

9. La Déclaration des principes de la Conférence mondiale sur la réforme agraire et le développement rural (1979)
La Déclaration indique dans son article 1(7): " Estimant que la pauvreté, la faim et la malnutrition freinent les efforts de développement national et ont des répercussions négatives sur la stabilité économique et sociale dans le monde et que leur élimination définitive est l'objectif premier du développement mondial . . . " Au paragraphe 14 du même article les États parties reconnaissent " que le système des Nations Unies a la responsabilité de formuler une nouvelle stratégie de développement et que l'Organisation pour l'alimentation et l'agriculture, conformément à sa constitution, a l'obligation explicite d'élaborer les volets de cette nouvelle stratégie portant sur l'alimentation . . . "

10. La Commission Codex Alimentarius du code d'éthique pour le commerce
International
(1979)
La Commission Codex Alimentarius reconnaissait qu'une alimentation suffisante, sûre, saine et complète est un élément vital pour parvenir à des niveaux de vie acceptables et que le droit de l'individu et de sa famille est proclamé dans la Déclaration universelle des droits de l'homme de l'ONU. Dans l'article 2(1) il est indiqué que " ce code s'applique à toute nourriture introduite dans le commerce international " et au paragraphe 2 du même article il est souligné que " ce code établit des normes de conduite éthique devant être appliquées par tous ceux concernés par le commerce international dans l'alimentation ".

11. La Déclaration sur la nutrition de la Conférence internationale sur la nutrition (1992)
La Déclaration rappelle la coopération internationale dans la réalisation du droit à l'alimentation en indiquant: " Au nom du droit à un niveau de vie décent, et notamment à une alimentation suffisante, énoncé dans la Déclaration universelle des Droits de l'Homme, nous nous engageons à agir en commun pour que le droit d'être à l'abri de la faim devienne une réalité. Nous prenons le ferme engagement d'œuvrer ensemble pour le bien-être nutritionnel durable de tous dans un monde en paix, juste et écologiquement sûr".

Compte tenu du nombre important de déclarations internationales sur le droit à la nourriture, certaines personnes pourraient faire valoir que le droit à l'alimentation fait désormais partie du droit coutumier international. 

cela peut se traduire par une pression considérable sur les ressources nationales.  La coopération internationale dans la réalisation progressive du droit à l’alimentation, comme le prévoit l’article 2(1) du PIDESC, signifierait qu’il doit y avoir une contribution internationale en faveur des pays dénués de ressources, pour le financement de ces programmes—et non seulement en cas de calamités naturelles ou politiques.

Auteur:  L’auteur de ce module est Rolf Kunneman.

NOTES


1.  . Susan George et Nigel Paige, « Food for Beginners » (Londres: Writers and Readers Publishing Cooperative Society, Ltd., 1982)

2.   Amartya Sen, Poverty and Famines: An Essay on Entitlement and Deprivation (Oxford University Press, 1987), 165-66.

 3. Tradition orale du Nigéria (extrait); trans. Ulli Beier, dans 3000 years of Black Poetry: An Anthology (New York: Dodd, Mead, 1970), 156

 4.  Economic Human Rights: Their Time Has Come (Heidelberg: FIAN International Secretariat, 1995), 48.


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