UNITED
NATIONS

Conseil Economique et Social

Distr.
GENERALE
E/CN.4/1996/14/Add.1
10 avril 1996
FRANCAIS SEULEMENT


COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME
Cinquante-deuxième session
Point 17 de l'ordre du jour

SERVICES CONSULTATIFS DANS LE DOMAINE DES DROITS DE L'HOMME

Assistance à la Somalie dans le domaine des droits de l'homme

Rapport sur la situation des droits de l'homme en Somalie établi par M. Mohamed Charfi, expert indépendant, conformément à la résolution 1995/56 de la Commission

Additif

Introduction

1. Comme cela a été annoncé au paragraphe 21 du document E/CN.4/1996/14 du 22 février 1996, l'expert indépendant a effectué sa mission du 22 février au 13 mars 1996 : il s'est rendu successivement à Londres, Genève, Nairobi, puis en Somalie où il a visité les villes de Bosasso et Hargeisa.

2. A Londres, une séance de travail a été tenue avec des responsables d'Amnesty International ayant une connaissance approfondie de la situation en Somalie. A Nairobi, diverses réunions de travail ont eu lieu avec des organismes des Nations Unies, notamment le PNUD/Somalie, le Bureau des affaires politiques pour la Somalie (UNPOS), l'Office des Nations Unies pour le développement de la Somalie (UNDOS), le HCR, l'UNICEF, et l'Envoyé spécial de l'Union européenne pour la Somalie.

3. L'expert indépendant a également rencontré les membres des représentations diplomatiques du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord, de l'Italie et des Etats-Unis d'Amérique, le Directeur de l'US­AID/Somalie et l'émissaire du Sultan de Warsangeli, sur leur demande, ainsi que des responsables d'organisations non gouvernementales, principalement internationales ayant une activité en Somalie. Il s'agit de l'association "United Somalia Roots" (qui défend les droits de la minorité aborigène de Somalie habitant la région antérieurement à la conquête arabe), Médecins sans frontières, CARE et Life and Peace Institute (LPI). Il a en outre recueilli des renseignements intéressants auprès du personnel des organismes des Nations Unies et des ONG qui interviennent en Somalie dans le cadre de l'assistance humanitaire internationale aux populations somaliennes.

4. A Hargeisa, l'expert indépendant s'est entretenu avec "le ministre des affaires étrangères" et "le ministre d'Etat aux affaires étrangères" de l'Etat auto­proclamé du Somaliland, ainsi qu'avec M. Mohamed Khalil, consultant, chargé de la préparation du projet de nouvelle constitution de cet Etat.

5. A Bosasso, l'expert indépendant a rencontré des notabilités locales, des journalistes et des représentants de la société civile de la province de Bari et des représentants des chefs traditionnels et des sages des deux provinces de Sanaag et de Sool (Somaliland). Il a également assisté à une réunion regroupant 154 personnes représentant l'ensemble de la province de Bari, dont l'objectif était de mettre en place un conseil régional chargé de l'administration de la province. Il a pu en outre rendre une visite inopinée à un tribunal, un commissariat de police et la maison d'arrêt de Bosasso.

6. Enfin, l'expert indépendant a passé une journée dans le camp de réfugiés de Dadaab (dans le nord du Kenya) tenu par le HCR et s'est entretenu avec les responsables du camp et des représentants de diverses communautés de réfugiés hébergés dans le camp.

7. L'expert indépendant avait également envisagé la tenue d'une séance de travail à Mogadishu-Sud avec des représentants du "gouvernement" dirigé par le général Aïdeed. La rencontre n'a pu avoir lieu faute de temps suffisant pour la planifier. Ces différents entretiens et visites ont permis les constatations qui suivent.

1. Guerre civile et violations des droits de l'homme

8. Le contexte historique et l'évolution de la Somalie jusqu'à la crise actuelle ont été suffisamment exposés dans le rapport du précédent expert indépendant (E/CN.4/1994/77 et Add.1) et celui auquel le présent texte sert d'additif (E/CN.4/1996/14). Il suffit de rappeler que la guerre civile avait déjà commencé au cours des trois dernières années du régime du général Siad Barre et s'est poursuivie avec une violence particulièrement meurtrière pendant plus d'une année après. Avant sa chute en janvier 1992, le régime de Siad Barre a réprimé de manière très brutale la révolte du peuple somalien. Les tueries, les massacres et la destruction indiscriminée des biens ont été pratiqués à grande échelle.

9. A titre d'exemple, la ville de Hargeisa a subi en 1989 des bombardements intensifs de l'aviation et de l'artillerie pendant plusieurs jours. Les vestiges de ces destructions, encore perceptibles aujourd'hui dans la majeure partie de la ville, témoignent de la barbarie des attaques. Comment qualifier autrement ces actes lorsque les symboles tels le théâtre provincial et le musée n'ont pas été épargnés et que, par ailleurs, le bilan des pertes en vies humaines est chiffré à quelque 30 000 morts.

10. La chute de Siad Barre n'a pas apporté la paix recherchée par les chefs de la rébellion. Il était devenu courant qu'une faction sur le point de perdre le contrôle d'un territoire pratique la politique de la terre brûlée, alors que la faction victorieuse se privait rarement d'actes répréhensibles tels que le pillage, la destruction de biens privés et publics, les viols et les massacres de tout résistant à l'occupation.

11. L'une des conséquences de l'état de belligérance a été l'impossibilité d'acheminer l'aide humanitaire à la population civile. Ainsi, aux morts par la violence se sont ajoutés les décès par la famine, jusqu'à l'intervention de l'ONU à travers l'UNITAF et l'UNOSOM dont le repli s'est achevé le 2 mars 1995. On estime aujourd'hui les pertes en vies humaines à 300 000, et à plusieurs centaines de milliers le nombre de personnes déplacées (volontairement ou mouvement forcé de populations pour des raisons ethniques).

12. Selon des informations concordantes provenant de sources diverses, il y aurait eu de véritables cas d'épuration ethnique dont on retiendra les suivants :

i) Hargeisa, en octobre 1988, pour un groupe de 300 à 400 personnes d'origine indienne.

ii) Mogadishu, en janvier 1991 pour un groupe de 1 000 personnes d'origine indienne aussi, dont la plupart était constitué de commerçants aisés.

iii) Brava, dans le sud du pays, pour un groupe d'un millier de personnes d'origine arabe, très probablement d'origine omanaise. Les survivants se sont installés au Kenya ou dans les pays du Golfe.

iv) Bajuni, toujours dans les îles du sud au large de Kismayo, en 1992, pour un petit groupe de pêcheurs d'origine pakistanaise dont les rescapés se sont également réfugiés au Kenya.

13. Les tueries, meurtres et assassinats sont le fait de responsables politico­militaires dont certains sont connus et vivent paisiblement en Somalie, protégés par les membres de leurs clans, ou encore de dirigeants de factions armées. Ces faits constituent parfois des crimes de guerre, voire des crimes contre l'humanité, et sûrement des crimes prévus et punis par les lois pénales somaliennes, lois du lieu de commission des infractions et donc susceptibles d'être appliquées à leurs auteurs.

14. Il est à peine besoin de rappeler que la législation pénale de l'Etat somalien promulguée dès l'indépendance est encore théoriquement en vigueur puisqu'elle n'a été formellement abrogée par aucune des autorités exerçant des fonctions de gouvernement. L'absence actuelle d'un Etat somalien exerçant une autorité gouvernementale centrale unique ne devrait pas être synonyme de vide juridique. Ces crimes qui sont, d'un point de vue légal parfaitement punissables, restent malheureusement impunis. Il s'agit là d'une injustice que la communauté internationale a l'obligation morale de réparer.

2. Les tribunaux dits "islamiques"

15. La conséquence immédiate de la guerre civile a été la destruction de l'Etat et de tout l'appareil administratif et judiciaire, une situation de chaos et d'insécurité qui a favorisé le développement du grand banditisme. Cette situation a suscité chez la population la soif d'une justice rapide et même expéditive et brutale, à la condition qu'elle fût efficace. C'est dans ce contexte que sont apparus, au début sur initiative populaire, les tribunaux dits "islamiques".

16. A la fois par démagogie et par opportunisme, plusieurs chefs de factions cherchant à exploiter le sentiment religieux de la population, ont accompagné le phénomène, l'ont appuyé ou l'ont même renforcé. Aujourd'hui, en dehors des territoires contrôlés par "l'Etat du Somaliland" et ceux qui sont occupés par le général Aïdeed, on assiste à une floraison des tribunaux dits "islamiques" un peu partout dans l'ancienne Somalie.

17. En fait, ces tribunaux n'ont de religieux que le nom : les magistrats qui y siègent n'ont de formation approfondie ni en matière religieuse, ni en matière juridique. En outre, la religion islamique ne contient pas de règle de procédure civile ou pénale, sauf le principe général selon lequel il faut juger avec équité. Les règles précises d'organisation des procès ne sont donc pas définies par la loi divine et sont laissées à la libre appréciation des hommes. Il est donc erroné de qualifier d'"islamiques" des tribunaux qui fonctionnent sans règles de procédure. Trois reproches essentiels doivent être adressés à cette "justice" :

i) Son caractère expéditif à cause de l'absence de règles précises de procédure pénale. Les droits de la défense ne sont pas toujours respectés.

ii) L'absence de voies de recours : il n'existe ni possibilité d'appel, ni moyen de pourvoi en cassation.

iii) Le caractère inhumain et dégradant de la plupart des sanctions pénales prononcées. Ce sont surtout des châtiments corporels : flagellation, amputation de membres, loi du talion et peine de mort, parfois par lapidation. Ces peines qui constituent des atteintes graves à l'intégrité physique de la personne humaine, sont contraires à la Déclaration universelle des droits de l'homme et au Pacte international relatif aux droits civils et politiques et doivent pour cela être dénoncées.

18. En fait, les nombreux cas d'exécutions sommaires et d'atteintes à l'intégrité physique de prévenus pour larcins ont provoqué une vive réaction de protestation des organismes des Nations Unies et d'ONG qui ont informé les parties prenantes du risque de tarissement de l'assistance humanitaire. Depuis lors, la fréquence de ces traitements inhumains a sensiblement diminué sans pour autant disparaître.

19. Récemment, certains tribunaux dits "islamiques" ont unilatéralement étendu leur propre compétence à des questions de prétendues atteintes aux bonnes moeurs. Au nord de Mogadishu, les acteurs d'une comédie musicale ont été flagellés et leurs instruments de musique saisis pour ce motif. Même l'intervention personnelle de M. Ali Mahdi, le chef politique de la région, n'a pas permis la restitution de ces instruments. Cet incident montre que certains de ces tribunaux sont en passe d'acquérir plus d'influence et de pouvoir que les chefs de clan; d'où le risque de propagation de l'extrémisme.

3. La situation actuelle

20. Du fait de la guerre civile, le peuple somalien a subi d'énormes pertes en vies humaines, connu des déplacements massifs de populations et des destructions de biens en tout genre : bâtiments publics et privés, ouvrages d'infrastructures tels que ponts, ports et aéroports. L'administration publique a presque disparu et l'économie, entièrement désorganisée, ne tourne plus qu'à une vitesse extrêmement ralentie avec juste un peu d'agriculture au centre sud et de l'élevage traditionnel au nord. L'université est fermée ainsi que la plupart des établissements scolaires primaires et secondaires.

21. En septembre 1995, le général Mohamed Farah Aïdeed qui contrôlait jusque­là le sud de Mogadishu et la zone qui l'entoure a conquis la ville de Baïdoa. Les pertes en vies humaines étaient très limitées du fait de la faible résistance des populations à l'occupant. En dehors de ce fait, du reste isolé, la situation militaire s'est à peu près stabilisée depuis deux ans environ. Affirmer que l'ordre règne et que la sécurité est assurée aujourd'hui en Somalie serait prématuré; mais l'état de guerre civile a cessé. Plusieurs groupes de réfugiés somaliens précédemment hébergés au Kenya ont pu retourner chez eux.

22. La population civile essaie de reprendre les choses en main en installant des éléments d'une administration locale. Grâce à l'aide internationale et à des initiatives populaires, des écoles sont réouvertes, tel port est remis en état et fonctionne tant bien que mal. La situation n'est plus au désespoir. Mais la Somalie n'a pas encore entamé son développement économique et social à cause de la persistance de l'opposition entre les différentes factions militaires en présence.

23. L'accord signé le 27 mars 1993 à l'issue de la Conférence d'Addis-Abeba ayant regroupé les 15 mouvements politiques somaliens est resté lettre morte. Bien plus, il semble aujourd'hui bien difficile de réunir une conférence similaire tellement les points de vue des dirigeants se sont progressivement éloignés les uns des autres.

24. Le général Aïdeed, qui contrôle principalement les trois provinces de Lower Shabelle, Bay et Bakool a constitué un gouvernement qu'il dit représenter l'ensemble de la Somalie. Il n'entend discuter d'égal à égal avec aucune autre partie. Aucune solution de réconciliation nationale globale et pacifique ne semble pour le moment être possible ni avec lui, ni sans lui.

25. M. Ali Mahdi qui contrôle le nord de Mogadishu et les provinces de Middle Shabelle et Hiran est lui aussi entouré par un gouvernement qui se dit "national".

26. Une véritable sécession a été opérée par l'Etat auto-proclamé du Somaliland qu'aucun autre Etat n'a reconnu et qui contrôle les six provinces de Awdal, Galbeed, Togdheer, Sanaag, Sahel et Sool; ce découpage correspond à l'ancienne colonie britannique. Mais les responsables de Somaliland invoquent comme motif de cette séparation les souffrances endurées sous la dictature de Siad Barre. Une charte d'indépendance a été adoptée et une nouvelle constitution aux allures démocratiques et modernes sera soumise à la discussion des chefs de localités et de clans, puis à un référendum populaire. Mais des chefs de clans des deux provinces de Sanaag et Sool affirment leur opposition à toute incorporation dans cet Etat sécessionniste et ont indiqué leur préférence pour une union avec les provinces du Nord-Est.

27. Dans les deux provinces de Nugaal et Mudug, deux administrations locales ont été constituées par des initiatives populaires et des chefs locaux. Une administration similaire est en train de se constituer dans la province de Bari, fief du Général Abshir. Les dirigeants de ces trois provinces envisageraient de se fédérer.

28. Au sud du pays, le général Morgan, ancien responsable dans le gouvernement de Siad Barre a imposé une accalmie depuis son installation dans cette région où son autorité n'est contestée par personne. Sa présence semble dissuader toute progression du général Aïdeed vers le sud du pays.

29. L'un des problèmes majeurs que rencontre le peuple somalien est celui de son identité. Ce peuple est divisé en tribus qui se subdivisent en clans et sous-clans. L'appartenance au clan semble être plus forte que celle à la tribu, laquelle à son tour est sûrement plus forte que l'appartenance à la nation somalienne. Cela est dû aux structures sociales qui ont été aggravées par deux faits récents.

30. D'une part, durant toute la période de dictature de Siad Barre, les cours d'éducation civique dans l'enseignement secondaire ont été utilisés pour propager l'idéologie du "socialisme scientifique" et le culte de la personnalité de Siad Barre, notamment à travers l'étude de sa vie et de son oeuvre, alors que ces cours auraient dû avoir pour objet de former les citoyens par l'enseignement des éléments constitutifs de la patrie et des principes et règles du régime démocratique, en particulier l'égalité des citoyens devant la loi et la non­discrimination en raison de la langue, la race, la religion ou l'origine ethnique.

31. D'autre part, à cause de la guerre civile, le peuple somalien a connu une hémorragie de cadres. La plupart des Somaliens qui ont une formation universitaire, les ingénieurs, médecins, juristes, hommes de lettres qui peuvent trouver du travail à l'étranger se sont expatriés. Or le rôle de l'élite dans le développement de chaque peuple n'est plus à démontrer.

4. Conclusions et recommandations

32. Il ressort de ce qui précède qu'un certain nombre de mesures sont à envisager aussi bien pour le passé que pour l'avenir.

a) Pour le passé

33. De très nombreux crimes ont été commis et ne doivent pas rester impunis. Leurs principaux auteurs sont connus ou peuvent l'être. En raison du contexte politique actuel, les auteurs de graves violations de droits de l'homme ne peuvent pas être poursuivis et/ou jugés aujourd'hui. Mais pour l'avenir deux hypothèses sont envisageables.

i) D'abord, il pourrait être envisagé un jour la création d'un tribunal pénal international pour connaître de ces actes criminels.

ii) Sinon, si entre temps une solution était trouvée à la crise politique somalienne, on peut espérer que les tribunaux nationaux en seront saisis.

34. Il pourrait s'écouler un certain temps avant que l'une ou l'autre des solutions précitées soient réalisables. Aussi, il n'est pas exclu que des éléments de preuve disparaissent. Pour faire face à ce grave risque, il est nécessaire que la communauté des nations constitue des dossiers d'instruction à titre conservatoire, dossiers qui seront soumis à la juridiction compétente le moment venu. Il faudrait pour cela, à titre prioritaire, enregistrer les témoignages, dresser des procès verbaux de constatation de faits, rassembler tous les moyens de preuves utiles.

35. L'ampleur des violations des droits de la personne humaine dans ce territoire est telle que l'entreprise dépasse de loin les moyens d'une seule personne. La complexité et la diversité des situations vécues requiert la création d'une commission d'enquête dotée d'un secrétariat étoffé et de moyens techniques conséquents.

b) Pour l'avenir

36. La reconstitution de l'Etat somalien pour mettre fin à la déconfiture actuelle ne peut être que l'oeuvre du peuple somalien lui-même. La communauté internationale peut et doit l'aider mais sans pour autant chercher à se substituer à lui. Cette reconstitution qu'on peut espérer sur une base consensuelle est d'autant plus difficile que la majeure partie de l'élite a émigré ailleurs et que la culture démocratique s'en est trouvée fragilisée. C'est sur le point précis de la restauration des réflexes démocratiques que l'ONU devrait orienter ses efforts.

37. La diffusion des principes des droits de l'homme est d'autant moins une immixtion dans les affaires intérieures de la Somalie ou une agression à l'égard de la culture somalienne que l'Etat somalien est partie aux principaux instruments internationaux de droits de l'homme. Ces instruments font donc partie du droit somalien.

38. La confection et la mise en oeuvre d'un programme de protection et de promotion de droits de l'homme serait un puissant levier de sensibilisation de la population aux normes internationales de droits de l'homme. Dans ses grandes lignes, un tel programme devrait notamment comporter les éléments suivants :

i) Une action orientée vers l'ensemble du peuple somalien. Ce dernier étant héritier de la civilisation orale, les émissions radiophoniques semblent être, entre autres, un des moyens les plus appropriés de s'adresser à lui. Les organismes des Nations Unies qui interviennent en Somalie dans le cadre de l'assistance humanitaire envisagent la création, dans les mois à venir, d'une station de radiodiffusion qui émettra pendant une heure par jour en somalien. A cette occasion, il serait particulièrement opportun de prévoir une rubrique quotidienne de vulgarisation des principes de droits de l'homme.

ii) Un effort particulier doit être fait en direction des jeunes scolarisés. La pénurie d'écoles primaires et des établissements d'enseignement secondaire ne doit pas empêcher l'ONU d'assister ceux des établissements qui fonctionnent, dans l'organisation des cours d'éducation civique comportant les principes de base des droits de l'homme et les règles essentielles de fonctionnement d'une société démocratique expurgée de pratiques discriminatoires. A cet effet, une formation spécifique pourrait être dispensée aux enseignants d'éducation civique. Des manuels devront être élaborés en langue somalienne aussi bien pour aider les élèves que pour faciliter la tâche aux enseignants selon le niveau. Enfin, quelques inspecteurs devront être formés pour encadrer l'ensemble du système.

iii) En direction des adultes, il serait intéressant de contribuer à l'encadrement de personnes susceptibles de promouvoir les conceptions des droits de l'homme dans la société civile. Pour leur sélection, compte devrait être tenu du niveau scolaire des candidats et de la représentation géographique équitable des provinces telles que découpées sous le régime de Siad Barre.

iv) En application du mandat que la Commission des droits de l'homme a défini comme base de formation pour le projet droits de l'homme en Somalie, le Centre pour les droits de l'homme devra, suivant en cela l'accord de l'ensemble des parties somaliennes à la Conférence d'Addis-Abeba et de la pratique suivie par les intervenants internationaux sur le terrain (organismes des Nations Unies et ONG), coopérer directement avec chacune des entités territoriales locales dans la formation du judiciaire, de la police et du personnel des services pénitentiaires.

Enfin, si ces propositions sont retenues et appliquées, une évaluation de la situation devrait être effectuée au bout d'une année.