University of Minnesota



Observations finales du Comit
é pour l'élimination de la discrimination raciale, Roumanie, U.N. Doc. A/50/18,paras.262-278 (1995).





COMITE POUR L'ELIMINATION DE
LA DISCRIMINATION RACIALE
Quarante-sixième session

EXAMEN DES RAPPORTS PRESENTES PAR LES ETATS PARTIES
CONFORMEMENT A L'ARTICLE 9 DE LA CONVENTION


Conclusions du Comité pour l'élimination
de la discrimination raciale


Roumanie



262. À sa 1096e séance, le 16 mars 1995, le Comité a adopté les conclusions ci-après.

a) Introduction

263. Le Comité remercie l'État partie pour son rapport, établi dans l'ensemble conformément aux directives du Comité concernant la présentation des rapports des États parties, ainsi que pour les données supplémentaires et les informations orales fournies par la délégation.

264. Il regrette toutefois que le complément d'informations donné en réponse à de nombreuses questions posées par le Comité au moment de l'examen du rapport — en particulier les informations communiquées oralement uniquement sur l'accord entre la Roumanie et l'Allemagne concernant le transfert des Sintis et des Roms — ait été insuffisant. Il invite le Gouvernement à fournir dans son prochain rapport des renseignements sur les points soulevés dans les présentes conclusions et à répondre aux questions posées lors de l'examen du présent rapport et restées en suspens. Le Comité suggère que le prochain rapport, qui devra être présenté en octobre 1995, ce qui laisse peu de temps, soit bref mais constitue toutefois une mise à jour complète de la situation quant aux droits protégés par la Convention et que le rapport suivant, qui devra être présenté en octobre 1997, fasse un tour d'horizon complet de la situation concernant tous les articles de la Convention.

265. Le Comité remercie la délégation de l'avoir invité à se rendre en Roumanie pour s'entretenir directement de la situation des droits de l'homme avec les autorités compétentes.

b) Facteurs et difficultés entravant l'application de la Convention

266. La Roumanie ayant un passé marqué par un autoritarisme qui a gravement entravé l'exercice de nombreux droits de l'homme dans l'État partie, il va de soi que la mise en place et l'application pratique de nouvelles structures politiques, économiques et sociales, démocratiques et non discriminatoires, représentent un processus difficile et qui prend du temps.

c) Aspects positifs

267. La Roumanie a également avancé dans le démantèlement ou la révision du cadre juridique mis en place au cours de la période de domination autoritaire, en particulier le Code pénal; il encourage la démocratie et l'ouverture dans la société roumaine et les codes juridiques s'harmonisent davantage avec les instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme, y compris la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale. Il a été noté aussi que des organismes nationaux de défense des droits de l'homme ont été créés, y compris le Conseil pour les minorités nationales, le Centre européen d'études des problèmes ethniques, l'Institut roumain des droits de l'homme et le bureau d'un médiateur qui s'occupera exclusivement de la défense des droits de l'homme et des libertés. On constate que ces mesures sont conformes à la Recommandation générale XVII concernant la création d'organismes nationaux de défense des droits de l'homme.

268. Quant aux nouvelles orientations politiques du Gouvernement concernant les minorités, il a été relevé que le Gouvernement avait l'intention de préserver l'identité ethnique, linguistique, culturelle et religieuse des minorités et de les protéger des tentatives d'assimilation forcée, d'exclusion ou de ségrégation, ainsi qu'il l'avait exprimé dans la Déclaration sur les minorités nationales du 20 novembre 1991. La participation accrue des groupes minoritaires à la vie politique en Roumanie, sur le plan tant national que local, a été notée.

269. On constate avec satisfaction que le Gouvernement s'efforce de faire davantage connaître les normes internationales relatives aux droits de l'homme par des cours d'instruction civique dans les écoles et des programmes de formation en matière de droits de l'homme, organisés en collaboration avec des organismes internationaux de défense des droits de l'homme, y compris le Centre pour les droits de l'homme de l'Organisation des Nations Unies. Les dispositions juridiques interdisant les déclarations qui encouragent le racisme ou incitent à la violence sont également jugées constructives.

d) Principaux sujets de préoccupation

270. Il est préoccupant que des attitudes xénophobes et des préjugés traditionnels contre certaines minorités persistent dans la société roumaine, ce qui se manifeste par l'apparition de partis politiques extrémistes et par l'augmentation des actes de violence.

271. Des préoccupations sont exprimées également au sujet du concept d'État-nation qui pourrait avoir pour effet d'affaiblir la politique de protection des minorités et provoquer une détérioration des relations intercommunautaires.

272. On constate que le nouveau cadre juridique de la Roumanie interdit les manifestations de racisme, y compris les actes de violence, la propagation de propos racistes et les pratiques discriminatoires dans le domaine de l'emploi, mais l'on ne discerne pas clairement les mesures concrètes que le Gouvernement prend pour traduire les interdictions inscrites dans les textes dans la pratique. On ne voit pas clairement, lorsque des actes de ce genre se produisent, de quels recours disposent les victimes ni si et de quelle manière l'État garantit que les coupables sont poursuivis de manière adéquate et dans les délais. On relève à ce propos qu'une explosion de violence, le 20 septembre 1993, a eu pour résultat le décès de trois membres de la communauté rom et la destruction des maisons de 170 autres, que les victimes n'ont pas encore été indemnisées ni les maisons reconstruites.

273. Il est préoccupant que l'on continue d'entendre parler de comportement raciste dans la police, soit qu'elle userait, de temps à autre, d'une force excessive contre les membres de certains groupes, soit qu'elle s'abstiendrait d'intervenir lorsque des actes de violence sont commis en sa présence contre certains groupes.

e) Suggestions et recommandations

274. Le Comité recommande au Gouvernement de donner dans son prochain rapport des renseignements sur la force juridique de la Convention en Roumanie, en particulier sur l'application de l'article 4, en précisant si cet article peut être directement invoqué par les victimes de racisme et si des affaires de ce genre ont été portées devant les tribunaux (et, le cas échéant, quelle a été l'issue des procès). Si un travail de codification est nécessaire pour incorporer la Convention dans la loi roumaine pour qu'elle puisse être directement invoquée, il est demandé d'indiquer où en est le processus de codification. Des précisions sont demandées également quant à la force juridique de la Déclaration sur les minorités nationales du 20 novembre 1991.

275. Le Comité recommande au Gouvernement de donner davantage d'informations sur la loi sur les minorités dans son prochain rapport. Ce rapport devrait contenir la définition juridique des "minorités", des renseignements sur chacun des groupes ethniques énumérés dans le rapport (par. 16) et des indications sur les éventuels programmes spéciaux, existants ou prévus, visant à améliorer la situation des minorités identifiées, en particulier les groupes les plus vulnérables. Il recommande aussi au Gouvernement de recueillir systématiquement des données sur les étrangers résidant en Roumanie et de prendre des mesures pour empêcher qu'ils ne soient harcelés ou victimes d'actes de racisme ou de xénophobie.

276. Le Comité invite le Gouvernement à donner des précisions dans son prochain rapport sur l'accord signé avec l'Allemagne concernant le rapatriement des Sintis et des Roms, en précisant notamment le nombre de personnes concernées, les groupes ethniques auxquels elles appartiennent et les mesures qui sont prises pour faciliter leur réintégration dans le pays de rapatriement.

277. Le Comité recommande au Gouvernement de lancer une campagne dans la presse, dans les écoles et par d'autres moyens dont il dispose, pour familiariser la population avec la Convention, tenter de faire évoluer les mentalités empreintes de préjugés contre les minorités et faire passer un message de tolérance. À cet égard, le Gouvernement devrait poursuivre son effort d'instruction dans les écoles en ce qui concerne les normes et les critères internationaux en matière de droits de l'homme et organiser périodiquement des programmes de formation à l'intention des personnes qui interviennent dans l'administration de la justice, y compris les juges, les agents de police et les avocats.

278. Le Comité recommande au Gouvernement de revoir et d'améliorer la formation des responsables de l'application des lois compte tenu de la Recommandation générale XIII du Comité.



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