University of Minnesota



Conclusions du Comit
é pour l'élimination de la discrimination raciale, Maurice, U.N. Doc. CERD/C/304/Add.19 (1996).




COMITE POUR L'ELIMINATION DE
LA DISCRIMINATION RACIALE
Quarante-neuvième session


EXAMEN DES RAPPORTS PRESENTES PAR LES ETATS PARTIES
CONFORMEMENT A L'ARTICLE 9 DE LA CONVENTION

Conclusions du Comité pour l'élimination de la discrimination raciale

Maurice


1. A ses 1173ème et 1174ème séances, tenues les 15 et 16 août 1996 (voir CERD/C/SR.1173 et 1174), le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale a examiné les huitième à douzième rapports périodiques de Maurice (CERD/C/280/Add.2) et a adopté, à sa 1180ème séance, le 21 août 1996, les conclusions suivantes :


A. Introduction

2. Le Comité accueille favorablement les huitième à douzième rapports périodiques présentés par le Gouvernement mauricien et se félicite de la reprise du dialogue avec cet Etat partie après neuf années d'interruption. Le Comité sait également gré à la délégation de haut niveau des informations détaillées qu'elle a présentées oralement en réponse au grand nombre de questions posées par les membres du Comité.

3. Il est noté que l'Etat partie n'a pas fait la déclaration prévue à l'article 14 de la Convention; certains membres du Comité ont demandé qu'il envisage la possibilité de faire cette déclaration.


B. Facteurs et difficultés entravant l'application de la Convention

4. Il est pris note du fait qu'aucun facteur ni obstacle important ne s'oppose à l'application effective de la Convention à Maurice.


C. Aspects positifs

5. L'esprit de tolérance exemplaire qui existe entre les diverses communautés raciales et ethniques de l'île Maurice et l'harmonieuse coexistence de leurs cultures font l'objet d'éloges car ils créent une base solide permettant de donner plein effet à la Convention.

6. La création au Ministère de la justice d'une unité administrative pour les droits de l'homme chargée de suivre les procédures d'établissement des rapports et d'en présenter périodiquement aux divers organes créés en vertu des instruments relatifs aux droits de l'homme est accueillie favorablement.

7. La création proposée d'une commission de l'égalité des chances dans le but d'obliger les employeurs du secteur privé à donner des chances égales aux personnes de différentes origines est également saluée.

8. Il est noté avec satisfaction que les juges peuvent se référer dans leurs décisions aux dispositions de la Convention et de tout autre instrument relatif aux droits de l'homme en sus ou en l'absence d'une disposition existante dans le droit interne.

9. Le système des meilleurs perdants, selon lequel la Commission électorale procède à la nomination de quatre députés de l'Assemblée nationale choisis parmi les candidats perdants qui ont obtenu les meilleurs résultats aux élections en vue d'équilibrer la représentation des diverses communautés raciales et ethniques à l'Assemblée nationale, est considéré avec intérêt.

10. En ce qui concerne l'article 2 de la Convention, l'on note avec satisfaction l'adoption en juillet 1991 de l'article 282 du Code pénal, qui qualifie de délit le fait de publier ou distribuer tout écrit de caractère menaçant, injurieux ou insultant, de faire un geste ou d'employer un terme de caractère menaçant, injurieux ou insultant en public, ou de diffuser tout matériau de caractère menaçant, injurieux ou insultant dans l'intention de provoquer le mépris ou la haine contre une partie quelconque de la population selon des critères de race, de caste, de lieu d'origine, de couleur ou de conviction.

11. Il est noté avec satisfaction que le plein exercice par chacun, dans des conditions d'égalité, des droits énumérés à l'article 5 de la Convention - en particulier le droit à la sûreté de la personne, au mariage, à la propriété, à la liberté de pensée, de conscience et de religion, au logement, à la santé et à la sécurité sociale, à l'éducation et le droit de prendre part aux activités culturelles - est garanti à Maurice.

12. La modification de la loi d'août 1995 sur la citoyenneté est un fait nouveau bienvenu puisqu'elle a aussi levé l'obligation pour les femmes étrangères mariées à des citoyens mauriciens de renoncer à leur nationalité si elles désirent acquérir la citoyenneté mauricienne.

13. Concernant l'article 7 de la Convention, on se félicite des diverses activités entreprises avec des organisations non gouvernementales, telles que le programme "Teaching for Freedom" lancé par Amnesty International, ou avec des institutions des Nations Unies telles que le programme introduit par l'UNICEF conjointement avec le Ministère de l'éducation pour sensibiliser les enfants aux idées de paix, de tolérance et d'interdépendance. En outre, l'élaboration en 1991 d'un plan directeur pour l'éducation en l'an 2000, visant l'enseignement dans les écoles de matières tendant à encourager la compréhension, la tolérance et l'amitié entre les nations et les groupes raciaux ou ethniques, est notée avec satisfaction.


D. Principaux sujets de préoccupation

14. On regrette l'absence de données statistiques sur la composition ethnique et raciale de la population, et sur la représentation des communautés ethniques et raciales à tous les niveaux dans les domaines économique, social et politique. A cet égard, le Comité souscrit à la déclaration faite au paragraphe 4 du rapport selon laquelle les recensements effectués à Maurice n'indiquent pas la ventilation de la population selon des critères ethniques ou raciaux, "les pouvoirs publics étant désireux de promouvoir une identité mauricienne indépendante de l'origine ethnique des habitants" pour autant qu'elle ne vise pas l'assimilation forcée de personnes d'origines différentes.

15. Des préoccupations sont exprimées quant au fait que l'article 16 de la Constitution, qui interdit l'adoption de toute loi discriminatoire en elle-même ou dans ses effets ne s'applique pas aux lois relatives au mariage, à l'adoption, au divorce, à la succession ou à d'autres questions relevant du droit privé.

16. En ce qui concerne l'application de l'article 4 de la Convention, il est noté avec préoccupation que les dispositions pertinentes de la législation mauricienne n'interdisent pas les organisations et les activités de propagande organisée qui encouragent la discrimination raciale, ainsi qu'en dispose l'article 4 b) de la Convention.

17. On regrette l'absence d'informations concrètes sur l'application des divers textes constitutionnels et juridiques traitant de l'interdiction de la discrimination raciale, sur les éventuelles violations et sur les mesures prises dans de tels cas, eu égard en particulier aux articles 4 et 6 de la Convention.


E. Suggestions et recommandations

18. Le Comité recommande au Gouvernement mauricien de fournir dans son prochain rapport périodique des données statistiques sur la composition de la population et sur la représentation de toutes les communautés ethniques et raciales dans les secteurs politique et économique. Le Comité lui saurait gré également de lui communiquer des indicateurs sociaux et économiques sur la population mauricienne.

19. Le Comité souligne l'importance d'une interdiction expresse de toute législation discriminatoire. A cet égard, le Comité recommande que l'interdiction d'une telle législation discriminatoire, visée à l'article 16 de la Constitution, soit étendue à toutes les questions relevant du droit privé.

20. Le Comité souligne que les dispositions de l'article 4 de la Convention sont obligatoires. Il recommande donc que des mesures législatives soient prises pour appliquer l'article 4 b) de la Convention.

21. Le Comité recommande que le prochain rapport périodique contienne des informations complètes sur l'application des diverses dispositions concernant l'élimination de la discrimination raciale dans la pratique et sur d'éventuelles plaintes et condamnations concernant des actes de discrimination raciale ou ethnique ou des affaires d'incitation à la discrimination raciale.

22. Le Comité suggère que le rapport de l'Etat partie et les conclusions du Comité soient largement diffusés dans l'île Maurice.

23. Le Comité recommande que l'Etat partie ratifie dans les meilleurs délais les amendements au paragraphe 6 de l'article 8 de la Convention adoptés lors de la quatorzième réunion des Etats parties.

24. Le Comité recommande que le prochain rapport périodique de l'Etat partie soit circonstancié et traite de tous les points soulevés dans les présentes conclusions.



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