University of Minnesota



Conclusions du Comité pour l'élimination de la discrimination raciale, Chili, U.N. Doc. CERD/C/304/Add.81 (2001).




COMITÉ POUR L'ÉLIMINATION DE
LA DISCRIMINATION RACIALE
Cinquante-cinquième session

Examen des rapports présentés par les états parties
conformément à l'article 9 de la Convention

Conclusions du Comité pour l'élimination
de la discrimination raciale

Chili


1. Le Comité a examiné les onzième à quatorzième rapports périodiques du Chili (CERD/C/337/Add.2) à ses 1346e et 1347e séances (voir CERD/C/SR.1346 et 1347), les 10 et 11 août 1999. Il a adopté les conclusions suivantes à sa 1361e séance (voir CERD/C/SR.1361), tenue le 20 août 1999.

A. Introduction

2. Le Comité se félicite de la présentation du rapport périodique de l'État partie, qui a été établi conformément à ses principes directeurs, ainsi que de l'occasion qui lui est offerte de renouer le dialogue avec le Chili. Il apprécie en particulier la franchise et la transparence qui caractérisent tant le rapport écrit que la façon dont la délégation a présenté des renseignements complémentaires et répondu oralement aux nombreuses questions qui lui ont été posées par les membres du Comité au cours de l'examen du rapport.

B. Aspects positifs

3. Le Comité félicite l'État partie de reconnaître ouvertement l'existence de la discrimination raciale sur son territoire, ainsi que ses liens historiques avec la conquête et le colonialisme. Dans ce contexte, il prend acte avec satisfaction de l'article premier de la loi No 19.253, relative à la protection, au progrès et au développement des autochtones du Chili (loi de 1993 relative aux autochtones), où il est reconnu que les habitants autochtones du Chili sont les descendants de groupes humains qui vivent sur le territoire national depuis l'époque précolombienne et qui conservent leurs propres caractéristiques ethniques, la terre étant pour eux l'élément fondamental de leur existence et de leur culture.

4. Le Comité a été heureux d'apprendre de l'État partie que, conformément à l'article 5 de la Constitution, les traités internationaux relatifs aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales tels que la Convention qui ont été ratifiés et promulgués par l'État partie et sont entrés en vigueur, sont directement applicables par les tribunaux.

5. Le Comité se félicite des initiatives prises par l'État partie pour promouvoir les droits de sa population autochtone, et notamment de la promulgation de la loi de 1993 relative aux autochtones; de la création ultérieure de la Société de développement des autochtones (CONADI) et des activités de cette dernière; des importantes mesures prises par l'État partie pour assurer le droit à la terre des autochtones en procédant à l'achat de terres et à leur cession aux communautés autochtones, et de la constitution d'un système judiciaire spécial pour les populations autochtones qui reconnaît la coutume comme moyen de preuve et autorise la conciliation, en particulier dans les conflits fonciers.

6. Le Comité note que de nouvelles mesures ont été prises pour réformer la législation interne; il prend acte en particulier des amendements qu'il est prévu d'apporter à la Constitution pour renforcer le statut juridique de la population autochtone, et du projet de réforme du Code pénal, actuellement à l'examen au Congrès, qui doit sanctionner les actes de discrimination fondée sur la race ou l'appartenance nationale ou ethnique. Dans ce contexte, le Comité se félicite aussi de l'intention de l'État partie de ratifier la Convention No 169 de l'OIT relative aux peuples indigènes et tribaux.

7. Le Comité note avec satisfaction que, tenant compte de ses conclusions précédentes, l'État partie a fait la déclaration prévue à l'article 14 de la Convention, par laquelle il reconnaît la compétence du Comité pour examiner les plaintes des personnes qui se déclarent victimes d'une violation par l'État partie des droits énoncés dans la Convention.

8. En ce qui concerne l'article 7 de la Convention, le Comité prend note de la réforme de l'enseignement introduite en 1997 et des mesures prises par l'État partie pour faire figurer dans les programmes scolaires l'enseignement des droits de l'homme et leur application. Il se félicite de la collaboration de l'État partie avec le Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme et de l'organisation, au Chili, en 1997, d'un atelier sur la possibilité de créer au sein du système des Nations Unies une instance permanente pour les populations autochtones


C. Principaux sujets de préoccupation

9. Le Comité note avec inquiétude que les résultats des recherches entreprises font apparaître qu'une importante proportion de la population chilienne a tendance à se montrer intolérante et raciste.

10. Le Comité s'inquiète de l'absence de textes législatifs permettant d'appliquer certaines des dispositions de la Convention. Il note que la loi de 1993 relative aux autochtones contient un article qui fait expressément de la discrimination intentionnelle contre les autochtones un délit punissable par la loi, et que la loi sur la sécurité nationale interdit les organisations fascistes, et rappelle les propositions de réforme de la Constitution et du Code pénal; il demeure toutefois préoccupé par l'absence d'un ensemble de textes législatifs reflétant pleinement le paragraphe 1 d) de l'article 2 et l'article 4 de la Convention.

11. Le Comité exprime son inquiétude au sujet des conflits fonciers qui se sont produits pendant la période à l'examen entre le peuple mapuche et des sociétés nationales et multinationales privées, conflits qui ont engendré des tensions, des violences et des heurts avec les forces de l'ordre et qui, semble-t-il, ont entraîné l'arrestation arbitraire de membres des populations autochtones.

12. Le Comité exprime son inquiétude au sujet de la situation des travailleurs migrants, en particulier les travailleurs de nationalité péruvienne.


D. Suggestions et recommandations

13. Le Comité félicite l'État partie de reconnaître sa part de responsabilité dans la discrimination dont la population autochtone fait l'objet; il rappelle sa recommandation générale XXIII et prie l'État partie d'envisager la présentation d'excuses officielles, ainsi que les moyens d'indemniser tous les intéressés, une telle politique contribuant notamment à favoriser le processus de réconciliation dans l'ensemble de la société.

14. Dans le cadre du processus de réforme législative en cours, le Comité recommande de modifier la Constitution pour y faire figurer l'interdiction de la discrimination raciale et d'étendre la portée de la loi relative aux autochtones de manière à couvrir la discrimination conformément au paragraphe 1 de l'article premier de la Convention.

15. Le Comité recommande que l'État partie prenne des mesures appropriées dans le cadre de la réforme législative en cours pour aligner pleinement sa législation avec l'article 4 de la Convention, conformément aux obligations faites aux États parties au paragraphe 1 d) de l'article 2.

16. Le Comité recommande que l'État partie utilise tous les moyens efficaces pour sensibiliser sa population aux droits des populations autochtones et des minorités nationales ou ethniques. Il encourage l'État partie à continuer de dispenser dans les écoles une instruction sur les normes relatives aux droits de l'homme et à organiser des programmes de formation, en particulier à l'intention des responsables de l'application des lois, compte tenu de la recommandation générale XIII.

17. Dans son prochain rapport, l'État partie devrait inclure des renseignements détaillés sur les points suivants : travaux et activités de la Société de développement des autochtones (CONADI); système de répartition des terres; régime juridique actuellement en vigueur pour les populations autochtones; situation des travailleurs migrants; application des articles 4 et 5 de la Convention et réformes législatives en cours.

18. Le Comité recommande que l'État partie ratifie les amendements au paragraphe 6 de l'article 8 de la Convention, adoptés le 15 janvier 1992 à la quatorzième réunion des États parties à la Convention.

19. Le Comité recommande que le prochain rapport périodique de l'État partie, qui doit être présenté le 19 novembre 2000, consiste en une mise à jour et traite des points soulevés dans les présentes conclusions.



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