University of Minnesota



Observations finales du Comité contre la torture, China, U.N. Doc. CAT/C/HKG/CO/4 (2009).


 

 

COMITÉ CONTRE LA TORTURE
Quarante et unième session
Genève, 3-21 novembre 2008

Distr.
GÉNÉRALE

CAT/C/HKG/CO/4

19 janvier 2009

FRANÇAIS

Original: ANGLAIS

EXAMEN DES RAPPORTS SOUMIS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 19 DE LA CONVENTION

Observations finales du Comité contre la torture

RÉGION ADMINISTRATIVE SPÉCIALE DE HONG KONG

1. Le Comité contre la torture a examiné le rapport de la Région administrative spéciale de Hong Kong, qui est inclus dans le quatrième rapport périodique de la Chine (CAT/C/HKG/4) à ses 844e et 846e séances, les 7 et 10 novembre 2008 (CAT/C/SR.844 et 846) et a adopté à sa 864e séance, le 21 novembre 2008 (CAT/C/SR.864), les observations finales ci-après.

A. Introduction

2. Le Comité accueille avec satisfaction le rapport de la Région administrative spéciale (RAS) de Hong Kong inclus dans le quatrième rapport périodique de la Chine, ainsi que les réponses écrites données à la liste des questions (CAT/C/HKG/Q/4/Add.1), qui ont apporté un complément d’information sur les mesures législatives, administratives, judiciaires et autres prises aux fins de la mise en œuvre de la Convention.

B. Aspects positifs

3. Le Comité relève avec satisfaction:

a) La promulgation de l’ordonnance intitulée Bill of Rights Ordinance (Charte des droits) (sect. 383), qui donne effet en droit interne aux dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques;

b) L’adoption, le 12 juillet 2008, de l’ordonnance portant création du Conseil indépendant d’investigation des plaintes contre la police, qui prévoit que le Conseil devrait commencer à exercer ses fonctions en tant qu’organe statutaire en 2009;

c) Les nouvelles directives sur la fouille corporelle des personnes privées de liberté adoptées et appliquées par la police depuis le 1er juillet 2008, qui visent à garantir que les fouilles soient conduites dans le respect de l’intimité et de la dignité des personnes;

d) Les mesures prises pour lutter contre la violence dans la famille, notamment le renforcement des services d’aide aux victimes et l’adoption en juin 2008 du projet de loi portant modification de la législation relative à la violence dans la famille (Domestic Violence
(Amendment) Bill).

4. Le Comité note que la RAS de Hong Kong a commencé à prendre les mesures nécessaires pour donner effet aux dispositions du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, afin d’étendre son application à la Région.

C. Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Définition de la torture

5. Le Comité prend note de l’explication donnée par la RAS de Hong Kong au sujet de l’expression «agent de l’État», figurant à l’article 2, paragraphe 1, de la Crimes (Torture) Ordinance, qui limite l’infraction aux professionnels normalement chargés de la garde ou du traitement de personnes privées de liberté. Le Comité réitère néanmoins les préoccupations qu’il a exprimées dans ses observations finales précédentes concernant le libellé actuellement trop restrictif de l’article 2, paragraphe 1, de l’Ordinance précitée, qui peut créer dans la pratique des lacunes susceptibles d’empêcher que les actes de torture soient effectivement poursuivis.

La RAS de Hong Kong devrait adopter une définition plus générale de l’expression «agent de l’État» dans le cadre de la définition de la torture, de manière à viser clairement tous les actes infligés par un agent de la fonction publique ou toute autre personne agissant à titre officiel ou à l’instigation ou avec le consentement exprès ou tacite de celui-ci. Le Comité recommande de plus à la RAS de Hong Kong de veiller à ce que la définition couvre tous les éléments énoncés à l’article premier de la Convention, dont toute forme de discrimination quelle qu’elle soit.

6. Le Comité note la position de la RAS de Hong Kong qui indique que la possibilité pour une personne accusée de torture d’invoquer pour sa défense «une autorisation, justification ou excuse», prévue à l’article 3, paragraphe 4, de la Crimes (Torture) Ordinance, sert simplement à donner effet à la deuxième phrase du paragraphe 1 de l’article premier de la Convention.

Toutefois − réitérant les préoccupations exprimées dans les précédentes observations finales − il souligne que la Convention n’autorise aucun moyen de défense possible pour les actes de torture.

La RAS de Hong Kong devrait envisager de supprimer les dispositions de l’article 3, paragraphe 4, de la Crimes (Torture) Ordinance qui permettent d’invoquer un moyen de défense; à cette fin, l’État partie pourrait par exemple incorporer l’article premier de la Convention dans sa Loi fondamentale, comme il l’a fait pour l’article 7 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Réfugiés et interdiction de renvoi vers un pays où ils risquent d’être soumis à la torture

7. Le Comité note avec satisfaction la coopération des autorités de la RAS de Hong Kong avec le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés en vue de garantir le respect du principe du non-refoulement et la protection des réfugiés et des demandeurs d’asile, mais il demeure préoccupé par l’absence de régime juridique pour l’asile, qui établisse une procédure équitable et efficace pour la détermination du statut de réfugié. Il est également préoccupé par le fait qu’il ne soit pas prévu d’étendre à la RAS de Hong Kong l’application de la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés et le Protocole de 1967.

La RAS de Hong Kong devrait:

a) Incorporer les dispositions de l’article 3 de la Convention dans la Crimes
(Torture) Ordinance;

b) Envisager d’adopter un régime juridique de l’asile mettant en place une procédure complète et efficace pour examiner minutieusement au fond chaque cas individuel, afin de déterminer si les obligations qui lui incombent au titre de l’article 3 de la Convention s’appliquent;

c) Veiller à ce qu’il existe des mécanismes adéquats pour le réexamen de la décision concernant chaque personne faisant l’objet d’une mesure de renvoi, d’expulsion ou d’extradition;

d) Accroître la protection, y compris la réadaptation et la réinsertion, offerte aux victimes de la traite, en particulier aux femmes et aux enfants, qui devraient être considérées comme des victimes et non comme des délinquants;

e) Prendre des dispositions efficaces pour suivre la situation de l’intéressé après son retour;

f) Envisager d’étendre à Hong Kong l’application de la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés et le Protocole de 1967.

Transfert de délinquants et de condamnés en fuite

8. Le Comité note que la RAS de Hong Kong et la Chine continentale ont tenu des discussions en vue d’un accord pour le transfert de délinquants et de condamnés en fuite et que des «garanties au sujet de la peine de mort» ont été prévues dans le projet d’accord.

Si elle recourt à l’application des «garanties au sujet de la peine de mort» en livrant des délinquants ou des condamnés en fuite, la RAS de Hong Kong devra donner au Comité, dans son prochain rapport, des renseignements sur le nombre de cas où des personnes ont été transférées ou renvoyées sous réserve d’assurances ou de garanties pendant la période couverte par le rapport, en indiquant les conditions minimales exigées par la RAS de Hong Kong, les mesures prises par la suite pour surveiller la situation des intéressés et la valeur juridiquement contraignante de ces garanties.

Formation

9. Le Comité note avec satisfaction que le Manuel pour enquêter efficacement sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (Protocole d’Istanbul) est diffusé auprès des professionnels concernés. Il lui a été indiqué que les professionnels des soins de santé savaient généralement reconnaître les signes qui font penser à des mauvais traitements ou même des actes de torture, mais le Comité souligne l’importance de programmes de formation plus spécifiques à l’intention des médecins et des autres professionnels de la santé, pour leur permettre de détecter les signes de torture et d’établir la réalité des faits ainsi que d’une formation permettant de tenir compte des sensibilités spécifiques de chaque sexe dans les institutions médicales et judiciaires.

La RAS de Hong Kong devrait faire en sorte que les professionnels de la santé reçoivent la formation et les informations nécessaires pour reconnaître et déceler les signes et caractéristiques qui peuvent faire penser qu’il y a eu torture, et pour offrir un traitement tenant compte des sensibilités spécifiques de chaque sexe dans les institutions médicales et judiciaires.

Fouille à nu et inspection des cavités corporelles

10. Le Comité prend note des nouvelles directives à l’intention de la police en vigueur depuis le 1er juillet 2008 relatives à la fouille des personnes gardées à vue. Il relève avec satisfaction qu’en vertu de cette procédure révisée un responsable désigné est tenu de justifier l’étendue et les modalités de la fouille en fonction de critères objectifs et identifiables mais il est préoccupé par:

a) La décision du Commissaire de la police que toute personne en garde à vue devait être fouillée quand elle entre dans un lieu de détention de la police, rendant les fouilles corporelles automatiques pour toutes les personnes en garde à vue, qu’il y ait ou non une justification objective pour la mesure;

b) Des allégations faisant état de fouilles à nu abusives, notamment dans les locaux du Département de l’immigration et du Département des services pénitentiaires;

c) Des allégations faisant état de la pratique systématique de l’examen des cavités corporelles à l’arrivée en prison des détenus, bien que l’article 9 du Règlement pénitentiaire de Hong Kong prévoie uniquement la possibilité d’effectuer ce type de fouille.

La RAS de Hong Kong devrait:

a) Veiller à ce que les fouilles à nu ne soient pratiquées sur des personnes en garde à vue que dans les cas où il existe une justification raisonnable et évidente.

Si cette fouille est effectuée, elle doit l’être par les moyens les moins intrusifs et en conformité totale avec l’article 16 de la Convention; en outre un mécanisme indépendant de supervision de la fouille devrait, à la demande du détenu, être assuré;

b) Établir des directives précises et strictes pour régir les fouilles à nu effectuées par des agents de la force publique, y compris ceux du Département de l’immigration et des services pénitentiaires; si des directives existent déjà, elles devraient être strictement respectées et leur application devrait être systématiquement vérifiée; des registres des fouilles devraient être tenus et toutes les plaintes pour abus devraient faire l’objet d’une enquête approfondie et si l’abus est établi le responsable devrait être sanctionné;

c) Trouver d’autres moyens que l’examen des cavités corporelles pour contrôler les détenus dans les circonstances ordinaires. Un tel examen doit être pratiqué en dernier recours seulement par un membre des personnels de santé dûment formé et dans le strict respect de l’intimité et de la dignité de la personne.

Opérations de police

11. Le Comité relève avec satisfaction l’information donnée par la délégation qui a expliqué que la police avait réexaminé et révisé fin 2007 les directives relatives au comportement des policiers qui prennent part à des opérations dans le cadre de délits liés à la prostitution. Il est toutefois préoccupé par les allégations faisant état de brutalités commises systématiquement au cours de ce type d’opérations.

Les autorités de la RAS de Hong Kong devraient mener des enquêtes approfondies sur toutes les allégations dénonçant des brutalités commises pendant des opérations de police dans le cadre de délits liés à la prostitution et, si les faits sont établis, les responsables devraient être poursuivis et punis. La RAS de Hong Kong devrait également lutter, notamment par des activités de formation et de sensibilisation, contre tous les comportements actuels laissant à penser que de telles exactions peuvent être tolérées.

Enquête indépendante sur les comportements répréhensibles de la police

12. Le Comité accueille avec satisfaction l’adoption, le 12 juillet 2008, de l’ordonnance relative au Conseil indépendant d’investigation des plaintes contre la police, qui confère au Conseil le statut d’organe statutaire, comme l’avait recommandé précédemment le Comité. Il est toutefois préoccupé par le fait que, alors que le cadre statutaire a renforcé son rôle indépendant, le Conseil n’exerce que des fonctions consultatives et des fonctions de surveillance portant sur le suivi et l’examen de l’activité du bureau des plaintes contre la police, qui demeure − de facto − l’organe chargé du traitement et de l’investigation des plaintes contre la police. À ce sujet, le Comité note également avec inquiétude que, malgré le nombre considérable de plaintes déposées au bureau des plaintes contre la police susceptibles d’être renvoyées aux autorités, un faible pourcentage a été déclaré fondé et dans un cas seulement un policier a été poursuivi et reconnu coupable d’une infraction pénale.

La RAS de Hong Kong devrait continuer de prendre des dispositions pour mettre en place un mécanisme totalement indépendant chargé de recevoir des plaintes dénonçant le comportement de membres de la police et de procéder à des enquêtes. Cet organe devrait être doté des ressources humaines et financières nécessaires et avoir la faculté d’émettre des recommandations contraignantes à la suite des enquêtes et des constatations de plaintes, conformément aux prescriptions de l’article 12 de la Convention.

Violence dans la famille

13. Le Comité note avec satisfaction les efforts déployés par la RAS de Hong Kong en vue d’éradiquer la violence dans la famille mais il est préoccupé par l’incidence élevée de cette violence dans la région.

La RAS de Hong Kong devrait:

a) Mener des enquêtes approfondies sur toutes les allégations de violence dans la famille et, si les faits sont établis, poursuivre et punir les responsables;

b) Intensifier ses efforts pour traiter le problème de la violence dans la famille par des mesures législatives et sociales et des mesures de politique générale;

c) Lancer des campagnes d’information et de sensibilisation et favoriser le débat public plus large afin de s’attaquer aux attitudes et aux stéréotypes qui peuvent être à l’origine d’actes de violence contre les femmes;

d) Apporter un complément d’information sur la question dans son prochain rapport périodique, notamment sur les progrès réalisés grâce à la base de données centrale renforcée sur la violence dans la famille qui va être bientôt opérationnelle.

14. Le Comité encourage la RAS de Hong Kong à mener à son terme le processus visant à donner effet aux dispositions du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, de façon qu’elles soient appliquées dans la RAS de Hong Kong.

15. La RAS de Hong Kong est invitée à diffuser largement le texte du rapport, des comptes rendus analytiques et des présentes observations finales, dans les langues voulues, par le biais des sites Web officiels, des médias et des organisations non gouvernementales.

16. Le Comité invite la RAS de Hong Kong à soumettre son document de base en suivant les directives harmonisées concernant l’établissement des rapports, approuvées par les organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme et figurant dans le document HRI/GEN/2/Rev.5.

17. Le Comité demande à la RAS de Hong Kong de lui faire parvenir, dans un délai d’un an, des renseignements sur la suite qu’elle aura donnée aux recommandations figurant aux paragraphes 7, 10 et 12.

18. La RAS de Hong Kong est invitée à soumettre au Comité son prochain rapport périodique, qui sera inclus dans le cinquième rapport périodique de la Chine, d’ici au 21 novembre 2012.

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